Salut Peter. Entrons dans le vif du sujet. Avec ce nouvel album il semble que le plaisir, la joie soient de retour. Peux tu nous en dire plus au niveau des textes ?
Peter Tägtgren : Les textes, comme toujours sont en lien avec ce que je vois dans le monde. Ils ne sont que le reflet de la réalité et tout le monde peut donc se retrouver dans ceux-ci. Je veux dire pour moi cela me permet de sortir ce qui est à l’intérieur à moi, et c’est toujours la même chose qui en sort, c’est un peu frustrant, tu vois ? Mais c’est comme ça que je ressens la chose parfois, tu fais une chanson, un album et après coup, tu te dis m…, ce n’est pas exactement ce que je voulais faire car je recherche la chanson parfaite, le son parfait…
Ce qui veut dire que tu ré écoutes tes anciens album…
… Ah non, je suis toujours fier d’eux…
… est ce que tu te dis que tu aimerais changer certaines choses ?
Oui, peut être que je le ferrai. Et c’est ce qui est si frustrant avec la musique, tu dois constamment faire quelque chose sous une autre forme. Mais c’est une histoire sans fin. Un truc à te rendre fou car tu es toujours à la recherche de la perfection. Mais c’est très difficile dans le cadre de l’industrie musicale et tout ce qui tourne autour qui est si stupide. Moi je veux juste faire ma musique… Libère moi des contraintes financières quotidiennes et je fais de la musique gratuitement, tu vois ? C’est ce que je ressens, c’est ma philosophie : mets de la nourriture sur la table et je fais de la musique (Sourire) ! Malheureusement plus tu as de succès, plus les gens veulent faire l’argent… mais j’en parle aussi dans les textes et c’est assez frustrant !
Tu parles du fait de devoir payer les factures au quotidien. Ne penses tu pas que les gens qui te voient faire et produire de très nombreux albums pourraient…
(Il coupe) Non, non, non, ce n’est pas pour de l’argent ! Non, je parle juste des textes. Pour moi, la musique reste encore un "hobby". Et comme je disais, je suis à en quête du son parfait. C’est ça qui me guide tout le temps quand je fais de la musique.
Et concrètement quel est le lien avec l’artwork ?
Aucun, vraiment ! Heile pouvait faire ce qu’il voulait. Ma seule demande c’est qu’il fasse quelque chose d’étrange, de bizarre… dans le genre comme si "L’étrange Noël de Monsieur Jack" rencontrait "Alice aux Pays des Merveilles" où tout paraît étrange les personnes comme le paysage… quelque chose dans ce genre…
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Rien à voir avec les extra-terrestres ?
Ouais un petit peu… Peut-être qu’il ressemble à un extra-terrestre mais ce n’était l’intention. Lorsque j’ai reçu le projet, ma réaction a été « Wouah, c’est dément ». Cela renvoi aussi bien à un quelqu’un de brillant que d’idiot. J’ai adoré, et n’ai pas souhaité de modification.
Comment enregistres-tu chaque disque de PAIN. Tu le disais qu’un de tes objectif était à chaque fois de composer La meilleure chanson. Est-ce que ton humeur du jour peut interférer ?
Quelque fois oui, mais sur ce dernier album je cherchais à faire quelque chose de plus sombre. PAIN a toujours eu le cul entre deux chaises : trop Heavy pour espérer un succès commercial et trop soft pour les fans d’extrême. Plus que chercher à faire quelque chose de plus Heavy, Je cherche surtout à faire une musique plus organique, de plus "humaine". C’est pourquoi, j’ai écarté les parties de programmation et les batteries électroniques. David (Wallin, Batterie) c’est chargé de toute cette partie et je n’ai rien modifié. Cela a été la même chose avec la basse.
Pour avoir un résultat plus "live" ?
Ouais, plus organique est le terme que j’utiliserai. Cela n’est pas important que tout soit parfait, que le tempo soit régulier à 100%, et cette manière de faire nous permet de passer un cap.
De paraître plus "vrai" ?
Oui, exactement c’est ça : pour donner l’impression d’être un véritable groupe.
Tu as fait de nombreux disques de PAIN sur la période 2005 – 2008, penses tu que ton retour dans un univers plus axé Heavy Metal avec HYPOCRISY, t’as aidé à appréhender ce nouveau disque de manière plus fraîche ?
Oui, il y a de cela aussi. Dans le passé, lorsque j’ai commencé avec PAIN, j’ai dû créer mon propre groupe, mon propre univers. Je souhaitais m’éloigner du Black et du Death metal. En tant que producteur, je souhaite rester dans le même style musical, mais je souhaite également élargir mon champ de vision, tenter de nouvelles choses, de nouvelles technologies. Je me suis alors mis à écrire de la musique, et cela à lancer PAIN.
Tu as dit que l’un des objectifs de PAIN est de conquérir la terre avec tes tubes ?
Non, ce sont des bêtises, une blague qui a malheureusement été reproduite. Non, ce que je voulais dire c’est que je veux être le meilleur dans mon style, mais dans mon style il n’y a pas grand monde. Nous sommes assez seuls, et donc (Rires)…
Il est vrai que PAIN fait une musique assez originale…
Oui, dès que j’ai repris le groupe avec "Rebirth" n’a plus été pareil. J’ai vu In Flames commencer à faire la même chose, Soilwork pareil… Ils ont développés le truc de leur façon, moi de la mienne…
Mais as-tu le sentiment d’être un précurseur dans ce style ?
Je ne sais pas. Il faut bien que des personnes fassent avancer les choses. Et je pense que dans chaque groupe, les gens tentent de faire des choses différentes, originales. A l’inverse, il m’arrive d’ailleurs de ne pas souhaiter bousculer les choses par peur d’être à côté du truc. En fait, je m’en moque un peu et je fais mon truc. Si j’aime, cela fini sur l’album…
Tu dois pourtant ressentir de la fierté de voir que certains groupes sont influencé par ton travail ?
… En faisant la même chose ? Oui, oui, bien sûr.
Au regard du nombre de disques que tu as sorti avec PAIN, est ce que l’on peut dire que c’est ton projet principal ?
Oui, c’est sûr. HYPOCRISY est déjà à son apogée et nous avons travaillé dur pour cela. Mais maintenant l’évolution ne peut plus aller vers le haut, nous ne pouvons que régresser. Et nous ne voulons pas régresser (Sourire) nous voulons rester au top et ce n’est possible qu’en écrivant de la bonne musique.
Et cela prend du temps ?
Oui ! Nous ne pouvons pas sortir un album tous les ans avec une qualité constante, ça n’a pas de sens. Alors nous prenons notre temps et nous sommes conscients que nous sommes au sommet de notre popularité dans ce style musical…
Et quand PAIN sera à ce même niveau de popularité…
Nous en sommes loin (Rires).
Quels seront alors tes nouveaux projets ?
Je ne sais pas, cela peut être n’importe quoi, mais PAIN est un projet très ouvert qui peut aller dans pleins de directions. Je peux y mettre toutes les idées folles que je peux avoir en tête. ..
Il n’y a pas de frontières ?
Exactement…
Pourtant, actuellement PAIN est considéré comme un groupe qui mélange le metal avec de la musique électronique. Pour toi, le groupe peut s’affranchir de ce style ?
Oui, déjà nous nous éloignons de la musique commerciale, au contraire, nous allons dans le sens inverse… avec plus de guitares, plus diversifié vocalement… Et je pense que c’est le bon choix à faire. Je peux me tromper, mais j’ai ce sentiment.
Par le passé tu nous as habitués à ce que les disques de PAIN comprennent de nombreux invités. Pourquoi ce n’est pas le cas dans ce dernier disque ?
Je n’avais pas le temps. Et je me demandais qui inviter : Gene Simmons ? Non, et même si je connais beaucoup de musiciens, lorsque j’invite quelqu’un sur un de mes disques, il faut que cela ait un sens.
Ce n’est donc pas un choix délibéré afin de gommer le côté "All Star Band" de PAIN ?
Non, même si je ne souhaitais pas faire un disque à la manière de.., tu sais le gars de EDGUY…
AVANTASIA ?
Oui. Je ne souhaitais pas me diriger vers ce type de projet. Et aussi ce n’est pas très honnête pour les autres mecs du groupe parce qu’ils ont participé à l’écriture de l’album sauf le batteur… Peut-être que sur le prochain, il y aura des invités mais avec cet album, j’étais vraiment dans mon monde et nous n’avions vraiment pas besoin d’invité.
A ce propos, quelle est la contribution des autres membres de PAIN dans le groupe ?
Ils sont très importants pour tout ce qui touche à la partie live. Je fais l’album et ils font le reste. David, le batteur, est également un pyrotechnicien qualifié, donc lorsque nous faisons de gros festivals il gère également cette partie là. Michael Bohlin (guitares) est plus impliqué dans le choix des choix pour les concerts, c’est son truc… Il faut faire attention aux autres choses également car il ne s’agit pas seulement de faire un album : il y a plein de chose à faire à côté et maintenant, nous sommes vraiment parés pour faire quelque chose de cool pour les tournées…
Ne penses tu pas que cette situation n’est pas frustrante pour eux ?
Non, David me dit qu’il est content de la manière dont cela se passe. Il arrive pour le concert, il n’a pas de pression, il s’occupe des effets pyrotechniques, fait ses trucs et est content. Et je pense que c’est le cas pour les autres aussi. Je connais plein de groupes qui fonctionnent ainsi à savoir une personne qui s’occupe de l’écriture et ça marche bien… Nous avons de bonnes relations, et cela fonctionne bien. Nous ne sommes pas mariés et nous pouvons voir un peu ailleurs (Sourire) !
Tu es le principal compositeur au sein du groupe. Lorsque tu écrits une chanson, as-tu le sentiment que tout est dit et fait dans ce genre ?
Ouais mais je ne prête plus attention à tout ça : le son… Je ne m’en soucie plus maintenant pour moi, ce qui compte c’est la chanson… écrire de bonnes chansons ! Et c’est une bonne chose de s’éloigner de ça !
Comment fais tu pour diversifier ta musique ?
Je me laisse influencer par les différentes musiques que j’aime et que j’introduis dans ma musique.
Est-ce que tes fonctions de producteur influent sur ta façon de composer ?
Par la passé oui, parce que je me focalisais plus sur le son lorsque je travaillais sur un album de PAIN. Avec le temps, le son vient de manière automatique, et donc, ce sont les chansons qui dirigent le processus de création des albums. Probablement que cela aurait du être le cas depuis le début. Mais au début, je trouvais plus d’amusement à expérimenter des choses au niveau du son et les introduire dans les chansons. Mais maintenant que je sais faire, maintenant je me focalise à écrire de bonnes chansons.
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Es-tu satisfait de votre dernier album si on le compare au précédent (Cynic Paradise - 2008), car tu ne dois pas être sans savoir que certaines personnes ont dit que ce dernier album était convenu ?
Ouais je sais. En fait, je n’ai pas pris de risque, je voulais être en sécurité sur Cynic Paradise. C’était ce que je pensais à ce moment-là. Et maintenant, pour ce nouvel album, j’ai osé aller plus loin et je pense que c’est ce que les gens attendent et c’est aussi pourquoi j’ai inclus la vidéo de "Dirty Woman" -titre qui ne sonne pas vraiment comme un titre de PAIN- mais j’aime voir les gens qui écoutent réagir : "Heu ? Heu ! Heu ? Mais diable qu’est-ce que c’est ?". J’aime vraiment surprendre les gens ainsi (Sourire)…
Quelle chanson préconiserais-tu à quelqu’un ne connaissant pas la discographie de PAIN ?
Wahou c’est vraiment dur… Euh je dirais peut être "I Am Going In" (Cynic Paradise 2008) qui est le titre le plus PAIN, ou bien "End Of The Light" (Rebirth, 1999), le genre de choses que les gens attendent de la part de PAIN.
Depuis le début nous parlons beaucoup de PAIN, mais de façon plus générale, quelle chanson choisirais-tu pour faire découvrir ton univers qu’il soit dans PAIN qu’HYPOCRISY ?
Oh c’est vraiment dur ! Pour moi une chanson doit avoir une bonne accroche, une bonne mélodie et un bon feeling… un peu comme AC/DC, mais en 2011. C’est la référence pour moi. Une batterie très présente, des guitares Heavy et beaucoup de mélodies.
Pour en revenir à ta question, c’est très difficile de choisir une chanson. Une bonne chanson doit t’emporter. Elle doit te chauffer lorsque tu conduits vers un bar ou vers chez toi. Te mettre dans une bonne ambiance.
Sans transition, quel est ton meilleur souvenir en tant que musicien ?
Hum, je ne sais pas… Peut être la Colombie durant la tournée avec HYPOCRISY. L’Amérique du Sud, c’est fou. Nous avions déjà été à Mexico auparavant, les gens sont dingues. Nous avons eu l’opportunité d’aller en Colombie pour la première fois. Nous avions l’impression d’être en pleine Beatles mania. Nous devions courir vers les lieux de concert, puis nous enfuir rapidement. Ce n’était que courses… (Rires) C’était fou !
Et bien sûr, la tournée avec NIGHTWISH, la première tournée avec NIGHTWISH… Mais je pense que nous avons gagné le respect des fans de NIGHTWISH, et lorsque nous avons tournée à nouveau avec ce groupe, la réaction du public a été fantastique et nous avons alors pu apprécier le chemin accompli. C’était un sentiment super. Il y avait des banderoles "PAIN" dans le public. C’était comme une sorte d’accomplissement (Sourire)…
Et ton pire souvenir ?
Cela est certainement lié à la Pologne. Il y a quelque chose qui ne marche pas pour nous avec la Pologne. Ca doit être lié à moi, je ne sais pas mais c’est étrange. Je me souviens que lorsque nous y sommes allés avec HYPOCRISY en tête d’affiche avec EXODUS en première partie. Après qu’EXODUS ait fini, nous allions entrer sur scène et les deux tiers du public était parti, il ne devait plus rester qu’une centaine de personnes et on se demandait ce qu’il se passait… Et quand on a fait cette tournée avec NIGHTWISH en Pologne. La journée précédente, il y avait 10.000 personnes et nous avions vendu plein de T-shirts presque autant que NIGHTWISH et le jour suivant, on jouait en Pologne, le public était cool, ça se passait plutôt pas mal mais après que le concert soit terminé, le gars du merchandising nous a demandé de deviner combien de T-Shirts on avait vendu ? Zéro ! Je ne comprends pas… Donc je ne sais pas, je pense que c’est mon pire souvenir mais nous devons encore travailler dur…
Quelle est la question que l’on te pose trop souvent ?
Trop souvent ? Je ne sais pas. Peut être qu’elle est ta priorité, PAIN ou HYPOCRISY ?
Ce ne sont pas les questions liées à BLOODBATH ?
Pas vraiment.
Quelles est ton opinion au sujet du dernier BLOODBATH justement ?
Je ne sais pas, je n’ai pas eu le temps d’écouter leur album. Ils voulaient que je chante sur une de leur chanson et m’ont envoyé une bande, mais je n’ai pas réussi à trouver le temps pour le faire.
C’est dommage...
Oui, je le pense également. Mais je n’aime plus vraiment depuis que Dan Swano n’est plus dans le groupe parce que je pense qu’il était un grand compositeur, et malgré les allers et venues des chanteurs, ils auraient dû le rattraper parce qu’il représente les fondations du groupe…
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Quelle est la question que tu souhaiterais que l’on te pose ?
Ouh encore une question difficile (Rires) ! (Silence) Mais j’y pense, j’ai changé d’idée à propos d’une question que tu m’as posé à propos du fait que je travaille trop… Ce n’est pas le cas ! C’est ce que je dois donner comme impression mais je ne suis pas comme ça, je prends mon temps pour tout ce que je fais. Parfois lorsque je fais de la production, les projets arrivent en même temps et les gens se demandent comment je peux tout faire ça ou ça… C’est simple je gère simplement les choses les unes après les autres.
Et c’est justement la question que tu aurais souhaité que je te pose…
Exactement (Rires)…
Est-ce que tu pourrais dire un dernier mot à nos lecteurs ? Et peut être en français ?
J’aimerais que les gens écoutent l’album, et viennent nous voir en concert au mois d’Octobre, car ce sera bien.
Nous avons un spectacle spécial. Cela coûte beaucoup d’argent (Rires) mais cela en vaut la peine, c’est vraiment très professionnel…
Merci beaucoup
Merci…
Et un grand merci à Valérie de Nuclear Blast mais également Noise pour sa participation mais surtout l’inestimable Nestor sans qui l’interview n’aurait jamais pu paraître…
Plus d'informations sur https://painband.bandcamp.com