Il est des années qui semblent bénies par les dieux du Métal. Songez que 1982 verra sortir, par exemple et dans le désordre, "Number Of The Beast" d'Iron Maiden, "Blackout" de Scorpions, "Restless & Wild" d'Accept, "Creatures Of The Night" de Kiss, "Iron Fist" de Motörhead, et… "Screaming For Vengeance" de Judas Priest ! Concernant ces derniers, leur précédent album ("Point Of Entry") a marqué un vrai recul après le magnifique "British Steel". Il était donc impératif de remettre les pendules à l'heure, et l'aigle métallique fondant sur sa proie qui orne la pochette, annonce la couleur. Si Tom Allom est toujours à la production et si l'enregistrement se fait à nouveau au Ibiza Sound Studio, il n'est pas pour autant question de se laisser aller aux débordements qui ont fait de son prédécesseur un disque plutôt moyen.
Et les choses sont claires dès un début d'album tonitruant où les titres se succèdent sur les chapeaux de roues et sur un tempo décoiffant. En effet, après l'intro grandiloquente représentée par "The Hellion", l'enchaînement "Electric Eye" – "Riding On The Wind" tranche dans le vif à grand coup de riffs rapides, de soli cinglants, de refrains hymniques et de déferlements rythmiques. Au point que l'on se surprend à reprendre son souffle sur un "Bloodstone" qui écrase pourtant tout sur son passage avec sa rythmique marteau-pilon et son refrain répétitif et obsédant. En une introduction et 3 morceaux, la messe est dite !
Bien sûr, nous pourrons toujours faire la fine bouche sur un passage un plus faible composé par un "(Take These) Chains" au refrain un peu niais malgré l'efficacité de son mid-tempo, et d'un "Pain And Pleasure" assez lourdingue, mais le reste remettra tout le monde dans le droit chemin. En effet, la suite est aussi variée qu'imparable. Sur le titre éponyme, le quintet de Birmingham crache à nouveau les flammes avec un riff rapide et des guitares acérées, un refrain hyper agressif et un Rob Halford s'envolant dans les aigus. Et l'enchaînement est imparable avec "You've Got Another Thing Comin'", véritable hymne de Heavy-Métal Mélodique doté d'un riff basique et répétitif mais d'une efficacité redoutable. Sur "Fever", Judas Priest varie les tempos et les ambiances pour nous permettre de reprendre nos esprits avec un refrain accrocheur et ceci, avant de nous achever avec le Heavy Rock'n'Roll d'un "Devil's Child' aux couplets syncopés, au refrain obsédant et à la rythmique piétinant toute dernière forme de résistance.
"Screaming For Vengeance" relance donc la carrière du Priest sur la voie royale qui lui revient de droit. Les Britanniques font preuve d'une dextérité instrumentale et d'un génie de composition qui les positionnent au-dessus de la mêlée, même si la concurrence devient rude. En tout cas, si la vengeance est un plat qui se mange froid, cette galette est quant à elle faite d'un métal en ébullition aux couleurs éblouissantes.