Profitant de la sortie de son nouvel album Whatever, le label Lion Records à eu la bonne idée de rééditer les deux albums de Jennifer Batten dont ce Above, Below and Belong de 1992. L’américaine a participé à plusieurs tournées de Michael Jackson (durant lesquelles on a pu la voir jouer à la perfection le délicat solo de Beat It composé à l’origine par Van Halen) ou plus récemment en collaboration avec Jeff Beck pour les très technoïdes Who Else et You Had It Coming. Jennifer a commencé à composer son premier album Above, Below and Belong à la fin des années 80, période dorée pour les guitaristes en recherche de rapidité et d’esbroufe. Cet album explore différentes directions musicales avec un point commun, la virtuosité de cette spécialiste du tapping à 8 doigts.
Le premier morceau, « Flight of the Bumble Bee », est un classique du genre, joué par les plus grands de Nuno Bettencourt en passant par Yngwie Malmsteen. Ce morceau composé à l’origine par le compositeur russe Nikolai Rimsky est indiscutablement bien exécuté par la belle blonde avec son tapping propre et clair. Jennifer n’a rien à envier aux virtuoses masculins car elle possède une technique hallucinante et une inspiration impressionnante. Le fait que ce soit une des seules femmes capables de ces prouesses l’a toujours placé dans une position particulière parmi les amateurs de virtuosité à la guitare. Vue au départ avec circonspection, elle a rapidement trouvé sa place. Et la qualité de ses albums réside dans le fait qu’elle n’a pas que la tentation, très masculine à l’époque, du 80 notes à la secondes. En effet si ses albums contiennent beaucoup de triple croches et de sextolets, le travail du son et la science des effets restent prédominants, comme par exemple avec « Whammy Damage » et « Cat Fight », deux morceaux dédiés à la fameuse pédale Whammy, dans lesquels elle fait une démonstration de maîtrise de l’engin tout en créant une vraie mélodie.
« Headbanger’s Hairspray » est un bel instrumental très fusion avec des passages extrêmement technique à la Steve Vai et de nombreux temps où la mélodie est reine. Même après presque quinze ans, ce morceau n’a rien perdu de son énergie et de sa modernité. La production de Michael Sembello était très performante pour avoir su traverser intacte une décennie et demie. Les ambiances tribales, chères à Jennifer, sont présentes dans ce disque à travers « VooDoo » et « Tarzens Day Off ». Le deuxième morceau sonne très années 90 avec ses sons clairs très vaien et Jennifer exprime de multiples émotions avec notamment sa maîtrise du Whammy Bar. « Cruzin The Nile » nous emmène sur les bords du Nil avec ses percussions et ses voix envoûtantes. C’est le seul morceau entièrement joué en son clair et dans cet exercice périlleux Jennifer s’en sort avec brio.
Above, Below and Belong, comme beaucoup de premier album de guitar-hero, est un florilège d’hommage aux différentes influences. Ainsi, « Giant Steps » est une grille d’accords de John Coltrane sur laquelle Jennifer Batten tente deux approches très contrastées, une jazz et une rock dans laquelle la section rythmique se régale. « Wanna Be Startin' Somethin' » est une version instrumentale du hit de Michael Jackson issu de l’album Thriller. Jennifer passe le morceau à la moulinette en gardant le tempo et la trame fondamentale. Elle se paie même le luxe de revisiter « Respect » le standard chanté par Aretha Franklin dans une version sur-vitaminée emmenée par la chanteuse Michele Rohl.
Ce Above, Below and Belong est une vraie perle de guitare instrumentale, assez proche des autres productions de l’époque mais en gardant une signature très personnelle. Il est bon de voir qu’une femme, même virtuose, peut faire sonner sa guitare avec originalité et créativité. Revoir des vidéos de Jennifer à l’époque de cet album ou des tournées avec Mickael Jackson est un grand moment tant au niveau de la musique et de la grâce qu’elle inspire dans son jeu qu’au niveau de sa permanente clignotant sous les spots. Le monde du métal instrumental avait besoin d’un bon bol d’air frais, Jennifer Batten reste à ce jour la seule femme ayant relevé le défi avec unanimité.