Peux-tu te présenter ainsi que ton groupe ? Que signifie Erdh ?
Nicolas Pingnelain: Erdh est un projet que j’ai crée il y a trois ans, à l’origine un projet solo. J'ai tout fait tout seul au départ: composition, enregistrement... L’idée était d’avoir des featurings par divers chanteurs dont j’appréciais le travail dans l’optique d’avoir une relecture. Le principe de base était que je donnais les titres au chanteur sans aucune indication, juste la musique et eux devaient écrire sur ce que ça leur inspirait. Sur cet entrefait, je rencontre le sieur Emmanuel dont je connaissais le travail par ailleurs (je suis le fondateur de obskure.com, je connaissais Manu depuis ses tout débuts avec Wormfood, on avait même chroniqué le premier album et j’avais apprécié le travail) et je lui ai demandé s'il voulait chanter sur un titre. Et puis assez rapidement il m’a dit “oui, il y a en même deux qui me plaisent”...
Emmanuel Lévy: Tout l’intérêt de Erdh est que j’avais des morceaux “clé-en-main”. Je n’avais plus qu’à écrire des textes en anglais, aller en studio et chanter. Les délais étaient assez restreints donc c'était un vrai challenge... En voyant cette opportunité, j’ai donc proposé à Nico de prendre toutes les chansons. On est même allé plus loin. Il y avait un titre instrumental au milieu de l’album et je lui ai dit que je me sentais de mettre des paroles dessus pour tenter de mettre un phrasé plus moderne, plus rappé ce que j’avais toujours eu envie de faire. Et voilà...
N: Le deal était de proposer une structure sur laquelle il n’avait pas son mot à dire et qu’il me propose des paroles sur lesquelles je n’ai pas mon mot à dire.
E: On a eu que le positif de cet échange... C’est un apport mutuel.
N: Même si pour moi ça a été dur de lâcher des bébés sur lesquels j’avais bossé trois ans...
E: Je me suis trouvé à ne plus avoir prise sur certains éléments...
Pourquoi avoir abandonné l’idée de plusieurs chanteurs ?
E: je ne lui ai pas forcé la main.
N: Ce n’est pas forcément facile de trouver des gens avec qui tu t’entends bien. Pour moi c’est hyper-gratifiant de voir quelqu’un qui dit je veux bosser sur un titre, puis deux, puis finalement tout les titres. En fait d’un projet solo avec des guest, on est arrivé à un groupe.
Comment avez-vous fait pour que l’album soit aussi homogène ?
N: Merci déjà. On le prend vraiment comme un compliment. Sur un travail de 3 ans il peut y avoir une variété de titres ou des changements dans le rendu. Finalement ma rencontre avec Manu a donné une cohérence là ou je ne l’attendais pas. Avec Erdh on est clairement dans de la musique avant-gardiste, mais pas dans le côté décousu...
E: Maintenant je ne peux plus écouter de choses trop avant-gardistes ou plutôt trop dans l’esprit fusion, par exemple les musiciens dont le pari est de prendre du death, du disco de la funk pour donner des structures décousues. J’ai besoin de choses plus calmes. Je ne suis pas avant-gardiste dans ce sens là, mais plutôt dans l'idée de proposer une formule différente et une forte personnalité. Je ne sais pas ce que c’est être avant-gardiste... On est peut-être retro-gardiste... (rires)
N: On ne veut pas être différent à tout prix. Mais d’un autre côté je ne vois pas l'intérêt de refaire ce qui a déjà été fait…
Que signifie Erdh ?
N: On ne vous le dira pas... Ça reste une des seules énigmes qu’on ne dévoilera pas.
Pourquoi ?
N: On est transparents sur pas mal de choses et c’est la seule part de mystère que l’on veut garder volontairement sur le groupe. L’explication est pourtant très simple mais on ne la donne pas...
Le projet a démarré depuis 3 ans, tu as donc fait des maquettes chez toi ?
N: Oui j’ai tout fait chez moi... Sur ordi. J’ai un home studio qui est bien pourvu, ça fait 20 ans que je fais de la musique. Techniquement, je suis sur Mac, je bosse sur Logic Pro. J’ai une guitare basse, une guitare, des synthés. Je joue sur une Gibson Reissue 58. Toutes mes grattes sont très typées metal...
Y-a-t-il un concept qui se dégage derrière cet album ?
N: Ce n’est pas un concept au sens strict du terme. L’idée comme indiqué sur notre site internet, c’est une apocalypse intérieure et personnelle. Un album exutoire d’éléments de la vie. Tout ce qu’a fait Manu ce sont des allégories, c’est très introspectif.
E: Toutes les chansons sont en quelque sorte des noyades. Des thèmes qui touchent plutôt à l’espace, aux réseaux, aux drogues... Il y a ce côté un peu moderne, pas SF pure et dure à la Blade Runner, mais plutôt le côté anticipation. Dans le premier titre il y a des références à Alien bien entendu, à Asimov aussi. L’idée c’était de reprendre certains slogans, certaines images pour les détourner sur le ton de la dépression et de la noyade.
Comment vous êtes-vous rencontrés ?
N: Moi je connaissais son boulot. On s’est rencontré à une fiesta que des amis communs avaient organisée (la radio Coma Electrique). Les bières aidant... Il y avait plein de gens et puis manu était là...
E: Il m’a parlé, j’ai écouté d’une oreille un peu distraite. Je n’aime pas trop ce genre de choses généralement, je ne cours pas après les opportunités, j’ai un agenda déjà ultra rempli. Mais, là ça m’a un peu tapé dans l’oreille, et puis j’ai dit pourquoi pas... Ensuite on est resté en contact, on a mangé sur Paris... D’autant plus que Obskure nous a beaucoup accompagné au début, je leur dois beaucoup...
Pourquoi as-tu eu envie de travailler avec Emmanuel ? Qu’est ce qui t’a touché dans sa voix ?
N: Il a un style et un registre clairement identifié. Il n’a reçu que les premières maquettes, il a en quelque sorte étendu “le domaine de la lutte”… A un moment tu as l’intuition, tu te dis ça va le faire... Il y a des parties dans son chant, dans sa voix entre Bowie et Supuration.
E: Quand tu commences dans le metal, il y a quelque chose qui te pousse à crier. Là, j’ai très peu utilisé les cris car je pense que je ne suis jamais aussi bon que dans l’émotion. Je n’ai plus tellement envie de hurler, j’ai juste envie de faire passer des ressentis.
N: Même si je n’ai pas de talent pour écrire des lignes mélodiques de chant, j’avais beaucoup d’idées de tessitures. Le fait que Manu vienne et me dise non là je ne vais pas crier, ça participe en quelque sorte au projet...
E: Et puis il y a de nos jours beaucoup de techniques qui permettent d’arriver à un effet monstrueux sans devoir crier.
N: Resilent est un album de plusieurs écoutes. A la suite des écoutes, tu peux te dire, tiens c’est marrant au niveau du chant, là il y a tel ou tel détail. Il y a une intervention de guitare que je n’avais pas entendue, etc. Et tenait vraiment à ça...
Pour un second album et avec ta rencontre avec Manu, est-ce ça ne va pas changer ta façon de composer ?
N: Je n’ai pas le talent (et ça c’est clair) sur les lignes mélodiques de chant. Et c’est pour ça qu’à un moment j’ai voulu lâcher le truc. Ça ne changera rien, car j’ai besoin de sortir musicalement ce que j’ai dans la tête et puis je ne vais pas lui faire de fleur en lui laissant de l’espace.
E: Je suis toujours là où on ne m’attend pas. Et puis quand je compose une ligne mélodique il y a toujours comme une interrogation, comme un désir de laisser de l’espace à Nico. On essaie vraiment de travailler en bonne intelligence.
N: Si je fais une partie ambiante et que je ne veux pas qu’il chante dessus pour ne pas dénaturer le truc, je suis sûr qu’il va le faire... C’est assez symptomatique, le deuxième album j’en ai fait à peu près la moitié, maquetté, et il ne l’a pas encore écouté. Il en a eu des bribes, mais je ne lui en ai pas laissé beaucoup de temps pour qu’il travaille dessus...
E: C’est mon habitude, j'attends d’avoir tout un bloc pour écrire des paroles. Parfois je vais plus loin, j’attends même que l’album soit enregistré, pour coller dessus mes lignes de chant. Je choisis le moment le plus opportun...
[IMAGE1]
Ce qui c’est passé avec Resilient semble vous avoir boosté ?
N : J’ai évacué tout l’apprentissage de la production grâce au premier album. Je me pose énormément de questions sur la structuration des morceaux. J’écoute aussi bien du metal que du goth. La question fondamentale dans Resilent c’est la dynamique et la gestion de la tension et de l’intensité. C’est pour ça que j’adore le post-rock. Il y a des groupes dans ce mouvement qui ont une grande science pour ce genre de choses. Je suis resté bloqué en 2004 avec l’album d’Isis Panopticon ou Perdition City d’Ulver. Je suis un gros fan d’I Am Ex. ce sont des choses qui m’influencent beaucoup.
Est-ce que tu n’as pas eu l’impression en ajoutant les lignes mélodiques de dénaturer les morceaux, est-ce que tu as du adapter des choses ?
N: Je n’ai rien eu à adapter et c’est la où Manu est fort. C’est vraiment ce que j'attendais et c’est là où on s’est trouvés. Il a réussi sans dénaturer le morceau à apporter quelque chose, et c’est vraiment cette idée de re-lecture, de nouvelle interprétation qui est intéressante. A la première écoute tu te dis “Il a tué le truc”, à la seconde écoute tu te dis: “il est bon...”
Est-ce que tu vas essayer de challenger Emmanuel et faisant des morceaux qui ne sont pas dans sa tessiture ?
N: Non. Parce que ça irait à l’encontre de principes même et fondamentaux du duo. Je ne voulais pas. A l’inverse il m’a bien challengé sur certains morceaux notamment Sinking en me disant que ce titre marque le pas par rapport aux autres. Du coup j’ai retravaillé la structure. Et il a eu raison de me pousser, sinon il ne serait pas aussi bon qu’il est... C’est redevenu mon titre préféré de l’album.
E: Un truc auquel je tenais sur Sinking notamment, c’était que nos deux voix se superposent à un moment sur l’album... Pour en quelque sorte faire acte de notre collaboration tout en gardant la poussée initiale, la rage qu’il avait quand il a fait sur ce morceau (pour des raisons que je ne connais pas complètement).
Le troisième membre du groupe c'est Axel Wursthorn ?
N: C’est un peu notre Gemini Cricket, notre directeur artistique, c’est lui qui garantit le bon goût dans notre projet. Quoi qu’il en soit, rien ne dit qu’on n’aura pas de collaborations. Il faut simplement que ce soit des gens dont on aime le travail. Je ne veux pas inviter pour inviter, il faut des gens qui apportent un truc au bon moment.
Votre album est largement inspiré de la SF, quelles sont les sources d’inspiration ?
E: Heinlein, Bradbrury, Simack, Norman Spinrad. J’aime toujours les choses qui sont un peu à l’avant garde. Heinlein j’aime beaucoup, c’est vraiment de la projection.
Pourquoi le circuit rose alors ?
E: Ahhhhhh. Tout est dans la chanson. C’est l’histoire de quelqu'un qui devient complètement accro à une nouvelle forme de sexe, avec une espèce de créature virtuelle. D’ailleurs, l’interprétation est libre comme sur l’ensemble des morceaux de l’album.
Est-ce un phantasme inassouvi ?
E: Non ce n’est pas un phantasme inassouvi. J’aime l’idée de ce type qui succombe à cette machine humaine qui traîne avec lui tout son mal être et qui finalement en meurt.
N: Quand j’ai fait le titre, j’avais des idées qui n'ont rien à voir avec la finalité du morceau, mais les gens trouvent qu'il y a un côté un peu lascif, c’est vraiment ça qu’on a recherché dans cette ré-interprétation. Je voyais pourtant plus quelque chose de brutal au départ. Pour moi il n’y avait rien de sexuel…
E: Au final c’était pour montrer quelque chose de très déshumanisé avec quelqu’un en proie à une addiction.
Est-ce que la technologie peut combler nos manques ?
E: Bien sûr. C’est l’exemple extrême de quelqu’un qui va déverser son manque affectif dans cette chose. Si tu relies le texte il y a un jeu : quand il parle de sa machine il passe de “it” à “she” pour revenir progressivement à “it”. Il l’humanise. Est-ce que tu succombes ou est-ce que tu arrives à t’en sortir, c’est un peu ça la question redondante sur resilience.
N: Le titre Resilent n’est pas anodin. C’est en mécanique, la capacité d’un matériau à reprendre sa forme initiale, mais ça a aussi été appliqué à l’esprit humain. Quelqu'un qui a subi un traumatisme violent, soit il s’en sort ou soit il s’effondre.
La resilence serait un rebond, or tout les personnages des chansons ne rebondissent pas, ils s’écrasent. Ils sont toujours très seuls. Est-ce que toi même tu es solitaire ?
N: Nous sommes des artistes maudits.
E: Le morceau titre est basé sur quelqu’un qui construit son bonheur sur le malheur des autres, en se délectant de ses crimes et en érigeant tout cela au rang d’art. C’est très grinçant. La résilience à eu lieu à travers cet album. On essaie de tirer de quelque chose d’individuel et d’assez bas-étage, quelque chose de plus universel.
Pourquoi les personnages des chansons sont-ils seuls ?
N: Les albums qui nous font vibrer les plus, ce sont ceux que l'on écoute seul, du début à la fin, et qui nous emmènent faire un voyage intérieur.
Dans ce voyage intérieur il n’y a pas trop de place pour l’espoir ?
E: L’espoir ce n’est pas trop notre fond de commerce... (rires)
Ni pour un dieu. Quel est votre point de vue sur la religion ?
E: Il est un peu déconnecté de ce qu’il y a dans l’album. On ne fait pas des disques pour évangéliser. Je me sens beaucoup plus judéo-chrétien que Nico. Mais tout cela doit amener à s'interroger, je suis plus pour l’exégèse, l’étude des textes que pour le dogmatisme qui me dérange.
N: On veut être tout sauf dogmatiques. On est respectueux de plein de choses. Personnellement je me situe plus comme un athée. On veut simplement comprendre pourquoi les gens en ont besoin pour pouvoir l'accepter.
Pourquoi dans le metal il y a une telle réflexion depuis quelques années ?
E: J’étais plus dans l’esprit death, black metal au début. J’ai voulu prendre un peu de distance par rapport à cet aspect brutal. Je veux simplement maintenant prendre les gens par la main pour les conduire vers un endroit qui les dérange.
N: Je ne veux pas trop intellectualiser le truc, mais plutôt simplement chercher l’impact ou l’émotion. C’est à ce niveau que se situe la double lecture. Ce que j’aime c’est quand quelqu'un me dit que mon album le touche.
E: C’est intéressant d’essayer d’aller vers quelque chose de complexe ou de différent.
On parle de percutant ou d’émotions, mais il y a beaucoup de passages electro, c’était voulu ?
N: Oui c’était voulu pour l’aération. C’est ce dont j’avais besoin toujours dans l’idée dynamique. Je ne voulais pas quelque chose de monolithique, mais plutôt de piloter la vibration. Vous allez voir dans le deuxième album nous sommes allés plus loin dans le mélange des genres.
C’est Jens Bogren qui a fait le mix ?
N: Bogren a fait un partie du mix...
Tu n’as pas eu peur que les éléments electro de Erdh soient noyés dans la production ?
N: Le fait de passer à Bogren ça a permis de lâcher prise, un peu comme avec Manu. Je lui ai simplement dit : “Maintenant je te donne les chansons et tu fais ta propre ré-interprétation, si tu mets plus fort ou moins fort les éléments electro c’est toi qui choisit”.
La patte Bogren confère cette homogénéité ?
N: Il a apporté une clarté à Resilent, mais aussi cet aspect très froid. On nous dit souvent que l’album est froid.
E: Il a fait un énorme travail sur les voix. Il avait carte blanche.
C’est assez paradoxal, car tu n’as pas réussi à déléguer les instruments ?
N: J’avais besoin de le faire moi-même. Je ne voulais pas lâcher ça car j’en avais tout simplement besoin. Je me suis souvent posé la question « est-ce que j’ai le niveau pour ». Donc le son des guitares c’est moi qui l’ai fait.
Une tournée est-elle prévue ? Comment sera-t-il possible de transposer cet album sur scène ?
E: L’envie du live on l’a, mais après quand et comment...
N: On n’a pas 20 ans donc on ne fera pas les bars de clermont-ferrand. Si on fait du live, il faudra faire un show complet (avec de la musique bien entendu, mais aussi des vidéos). C’est long d’envoyer du gros son avec des visuels. On en a envie c’est certain mais il y a surtout un problème de logistique.
E: Le metal est un genre très ingrat. La musique s'accommode mal des forts volumes et ça tue la musicalité. Il y a beaucoup de questions que nous nous posons…
Est-ce difficile d’organiser une tournée en France ?
E: C’est très facile, il te faut simplement beaucoup d’argent pour payer la tournée et malheureusement, je n’ai pas des dizaines de milliers d’euros sur mon compte. Je comprends parfaitement que tout ça corresponde à des impératifs économiques, c’est normal. Tous les groupes paient leurs tournées à l’heure actuelle car plus aucun tourneur ne veut avancer d'argent pour un groupe dans notre genre.
Vous aimeriez avoir un show complet ?
N: On ne fera pas autre chose qu’un show complet. C’est notre philosophie et ça se ressent sur le très beau packaging de l’album. On a grandi avec les CD et pas les MP3 donc on veut de beaux objets. Quand tu vas dans un concert, tu veux en prendre plein la gueule et pas voir chanter des gens sur des bandes.
Vous n’avez pas peur de perdre votre identité si vous engagez des musiciens de session ?
N: non car on est suffisamment dirigistes pour ne rien perdre. C’est nous les patrons, donc c’est nous qui donnons notre avis.
L’album fait penser à Supuration dans la démarche introspective. Est-ce que tu te sens proche de SUP ?
N: Oui j’ai grandi avec Loudblast et SUP même si je ne sais pas si on a la même approche. Le côté introspectif humain, c’est fondamental dans notre musique. SUP a un truc beaucoup plus black metal que nous. Un divorce c’est quelque chose de banal mais quand ça t’arrive ça ne l'est pas du tout. J’ai un pote qui est en train de divorcer, plutôt du genre à écouter du rock, et il m'a dit que notre album lui parlait. Clairement, ce n’est pas un album pour un mec qui veut faire la fiesta.
Qu’est ce que tu as envie d’incorporer sur le prochain album ?
N: Des vrais chanteurs en plus de Manu (rires). Le matériau de base ne changera pas, ce sera simplement un album “plus”, plus barré, plus tout quoi…
E: Franchement je ne pourrais pas te le dire. C’est l’inconnu. Combien il existe d’exemples ou des ratés deviennent des choses intéressantes. Parfois, dans l’urgence de la situation, tu changes un truc et ça le fait.
Cet album a été chroniqué chez vous (obskure.com) de façon objective ?
N: Cet album a été chroniqué par des gens qui bossent avec nous depuis 10 ans. Est-ce qu’ils ont été objectifs ? Je l’espère. Ils ont eu la pression sans que je leur mette, pour eux c’était un peu “ l’album du siècle”.
On pensait qu'on s'en prendrait plein la tronche par d’autres webzines mais globalement les retours ont été bons. On a eu une mauvaise chronique dans un media purement heavy mais de toutes façons, il est important de se faire un avis personnel.
Est-ce que tu es fier de ce que tu as fait ?
N: Je suis fier, t’imagine même pas ! j’ai quand même mon petit côté branleur. C’est énorme de se dire que tu sors un truc et que les gens adhérent. Mais malheureusement, on sait tous très bien que le succès critique ne veut pas dire succès commercial....
Est-ce que vous espériez cette reconnaissance plus jeune ?
N: Plus jeunes non. Ça fait 20 ans que je fais de la guitare. J’ai passé 10 ans à me dire, je ne veux pas faire de musique car je ne suis pas au niveau de ce que j’écoute. Là j’ai eu le besoin de le faire, sans se dire si ça va être bien ou pas. Le premier contact, ce sont les proches, après tu fais écouter à des gens comme Manu qui ont envie de bosser avec toi et c'est à partir de ce moment là que tu commences à y croire.
Avec Manu on s’est trouvé humainement, intellectuellement ça a donné une vraie accélération. Tu te dis que tu vas sortir un vrai album, le distribuer pour voir ce que ça donne. C’est plus qu’une fierté... Si j’ai une chronique positive je la publie dans les 5 minutes sur ma page.
E: Heureusement il y a des gens qui détestent ton travail !
Est-ce que pour vous le but final est de vendre ?
N: Non pas vraiment. J’ai la chance de pouvoir payer ma passion. Aucun investisseur va accepter de financer ton projet sans être sur de rentrer dans ses frais. Avec l’investissement global que ça représente, tu sais que tu ne rentreras jamais dans tes frais. On aurait pu simplement le sortir sur iTunes et empocher notre part au passage, mais on a voulu sortir l’objet sous forme de CD. On a poussé le niveau de détail au maximum sur le CD. Et tu n'imagines pas combien ça coûte les bandes noires que tu as dessus. Si on arrive à l’équilibre tant mieux, sinon tant pis, on se sera fait plaisir...
Ça ne vous fait pas peur le piratage ?
E: A un moment donné j’ai pas mal fait la chasse au piratage. Mais c’est perdu d’avance. J’ai la chance de gagner ma vie dans le domaine artistique, je n’ai aucun espoir de payer mes factures avec la sortie d'un album. Si quand même il y a un petit retour, hé bien, tant mieux, ça sera réinjecté dans du merchandising, dans un autre projet ou je ne sais quoi...
N: C’est l’idée de l’heureux accident. Si ça voulait bien marcher tant mieux mais on n’a pas besoin de ça pour vivre puisque Manu à son boulot et j’ai le mien. On sait qu’on n’en vivra pas, que l’on fait ça à nos heures perdues le soir.
Le piratage est un mal nécessaire, si l’album est piraté c’est qu’il y a une demande et c’est bon signe, si non c’est que tout le monde s’en moque… Si les gens pensent qu'un album est un produit que l’on écoute et que l’on jette, ils passeront à côté de celui-ci. Ce n’est pas quelque chose que tu écoutes une fois. Notre cible ce n’est pas les gens qui recherchent de l’instantané mais ceux qui sont perspicaces et qui reviendront dessus.
C’est quoi la question que l’on vous a trop souvent posée ?
N: Qu’est ce que ça veut dire Erdh ?
C’est quoi la question que vous aimeriez que l’on vous pose ?
N: Sans arrogance aucune d’où vient ce talent ?
Et donc d’où vient ce talent ?
N: Le secret c’est du travail, du travail et encore du travail... Le secret c’est aussi de savoir peaufiner chaque détail.
E: C’est la lecture de l’évangile (rires).
N: Il n’y a pas de secret ce sont des heures et des heures passées sur ce projet. Si tu ramènes l’album sur les trois ans passées à travailler dessus, ça fait deux secondes de musique utile créée par jour ! Mais je suis heureux de ce que l’on a fait, des bons retours...
E: Par retour il entend ceux des magasins qui nous renvoient l’album (rires).
Un mot de la fin pour les lecteurs de MW ?
E: Asymptote pourrait être le mot de la fin.
N: Le mot de la fin pourrait être asymptote ou billevesée, ou coxigrue (rires).
E: Il n’y a pas de mot de la fin, c’est le mot du début.
N: Le mot de la fin c’est suivez vos émotions.