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TITRE:
VISAVIS (19 AVRIL 2025)
TYPE:
INTERVIEWS
GENRE:
METAL MELODIQUE
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Plus sombre, plus lourd, plus viscéral : Visavis revient avec un EP coup-de-poing qui marque un tournant dans son histoire. Rencontre avec un groupe en pleine réinvention.
CALGEPO
- 07.05.2025 -
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Dans le sillage du tranchant "Great!", Visavis livre un nouvel EP aussi massif qu’introspectif : "The Art of Collapse". Un disque viscéral où le groupe assume plus que jamais sa mue metal, entre rage brute, textures électro et profondeur mélodique. Dans un monde en ruine, Visavis érige ses riffs en remparts et sa musique en manifeste. Rencontre avec un groupe plus vivant que jamais, bien décidé à faire entendre sa voix, quitte à défoncer les portes closes.
"The Art of Collapse” semble poursuivre la dynamique engagée avec "Great!" tout en franchissant un nouveau cap sonore. Avec le recul, diriez-vous qu’il s’agit d’une évolution naturelle ou d’un nouveau terrain de jeu assumé ?
Il y a une vraie évolution sonore, mais elle s’est faite naturellement. On ne s’est pas dit “tiens, on va faire du sludge ou du groove metal”, c’est juste ce qui est sorti de nous à ce moment-là. On est montés d’un cran, plus lourd, plus sombre, plus viscéral, plus moderne. C’est pas une stratégie, c’est une évolution instinctive. On ne force rien, on suit ce qu’on ressent, ce qui nous traverse. Et cette fois, ça donnait un truc plus dense, plus ancré. On a juste enfoncé le pied sur l’accélérateur.
Vous avez intitulé l’EP "The Art of Collapse". Vous y mettez en scène l’effondrement avec un certain panache. Cette chute, c’est celle d’un monde, d’une époque, ou une forme de renaissance artistique ?
C’est la première fois que l’on thème un de nos albums. A nos débuts, on a vécu à fond une époque rock’n’roll avec beaucoup de liberté et d’insouciance. Celle d’aujourd’hui est en chute libre. On a juste eu envie de le crier. "The Art of Collapse" colle avec l’actualité sombre de notre époque où toutes nos valeurs semblent exploser. On a voulu que chaque titre explore des thèmes tels que l'effondrement des systèmes, les tensions sociales actuelles, l'indifférence collective tout en célébrant la rébellion et la résistance à travers des riffs tranchants, une rythmique puissante, une ambiance électro et des voix profondes.
Le format EP vous réussit bien : direct, sans remplissage, chaque titre semble ciselé pour marquer. Est-ce un format que vous souhaitez désormais privilégier, voire imposer comme votre signature ?
Merci, ça nous fait vraiment plaisir que ça se ressente comme ça ! Le format EP nous convient particulièrement bien : il nous permet de concentrer notre énergie et notre créativité sur quelques titres forts, sans tomber dans le piège du remplissage. Et on n'a plus le temps de remplir une Track List juste pour faire du volume. On préfère que chaque titre claque, qu’il soit un single en puissance et qu’il soit taillé pour la scène autant que pour l’écoute. On ne cherche pas forcément à imposer ce format comme une signature, mais c’est vrai qu’aujourd’hui, ça nous parle plus qu’un album long format. C’est plus vivant, plus réactif. Ça nous permet de sortir de la musique plus régulièrement, d’évoluer morceau par morceau. Alors oui, tant que ça nous permet de garder cette intensité, on va sûrement continuer dans cette voie.
Le morceau ‘We don’t care’ ouvre l’EP de manière percutante, presque rageuse. À qui s’adresse ce morceau : à vos détracteurs, à vous-mêmes, au monde ?
'We don’t care', c’est un doigt levé à tout ce qui nous plombe. C’est pas un règlement de comptes, c’est une déclaration d’indépendance. Le morceau parle autant à ceux qui nous ont mis de côté qu’à nous-mêmes, à cette part intérieure qui doute ou freine. Et bien sûr, c’est aussi un message au monde tel qu’il tourne aujourd’hui : hypocrite, blindé, indifférent. Et puis on a décidé de s’en foutre de plaire à tout le monde, de rentrer dans les cases et de faire semblant. On maintient le cap et on avance pour ce qu’on est, libres et encore debout, malgré les tempêtes et les difficultés qui peuvent survenir.
On aime bien que nos titres soient atypiques et c’est systématiquement l’effet recherché.
On sent un équilibre plus maîtrisé entre mélodie et agressivité, notamment sur des titres comme ‘The story Ends’. Est-ce le fruit de l’expérience ou le reflet de vos envies du moment ?
Bien sûr, l’expérience et nos influences tout au long de notre parcours ont joué un rôle important dans cette évolution. Nous cherchons à surprendre au fil de nos album. Nous devions maîtriser cette alchimie entre mélodie et agressivité, et trouver ce juste équilibre qui permet à notre musique d’avoir de la profondeur tout en restant percutante. Nous avons travaillé pour ça. Mais ce n’est pas uniquement une question de technique ou d’expérience. C’est aussi le reflet de notre état d’esprit actuel. On a voulu que des morceaux comme 'The Story Ends' apportent à la fois une intensité brute et une certaine finesse atmosphérique pour créer une dynamique atypique. On aime bien que nos titres soient atypiques et c’est systématiquement l’effet recherché.

Dans "Great!", vous assumiez une orientation plus metal, avec des touches thrash comme sur ‘My Life Was Great’ ou ‘Loud & Rough’. Dans "The Art Of Collaps" on touche presque au sludge. Est-ce que vous vous sentez encore “rock” aujourd’hui, ou désormais pleinement ancrés dans le metal ?
Aujourd'hui, on se sent plus ancrés dans le metal. Bien que le rock reste notre point de départ, on a évolué vers des sons beaucoup plus metal, avec des influences qui se sont durcies au fil du temps. Avec "The Art of Collapse", on a vraiment plongé dans une vibe plus sludge, plus heavy, plus indus' parfois. Ce passage au metal est naturel pour nous, car il correspond mieux à notre état d’esprit et à l’intensité qu’on veut partager. On se sent aujourd'hui plus à l’aise dans cette dynamique, tout en gardant cette énergie brute et cette rébellion qui restent des éléments-clés du rock, mais à travers un prisme plus metal.
Dans "Great!", on sentait une volonté de s’affranchir des codes, de remettre Visavis en mouvement. Est-ce que "The Art of Collapse" confirme cette libération ou est-ce une forme d’apaisement après la tempête ?
Dans "Great!" on cherchait effectivement à briser nos chaînes, à se réinventer, à secouer nos codes et à mettre VV dans un autre mouvement. Avec "The Art of Collapse", on a poursuivi cette démarche, mais d’une manière plus introspective et encore plus affirmée. Ce n’est pas un apaisement, bien au contraire, c’est une étape qui marque un point d’inflexion dans notre son. Ce que l’on peut dire, c’est que notre prochain EP sera différent : plus abouti, plus lourd, avec des sonorités encore plus sombres et plus profondes. Nous avons l’intention d’explorer encore davantage ce côté viscéral du metal et de laisser libre cours à une agressivité maîtrisée. Nous sommes loin de nous apaiser, au contraire, on va encore plus loin, à la recherche de nouvelles dimensions dans notre musique.
Depuis votre retour, vous avez évoqué une approche différente de la composition, plus individuelle puis collaborative. Cette méthode est-elle désormais votre norme, ou variez-vous les processus selon les morceaux ?
Honnêtement, nous avons maintenant une méthode de composition bien rodée depuis nos 2 derniers EPs : on a juste trouvé ce qui nous va le mieux de par notre localisation géographique : Régis est à Tulle, Damien à Rennes, PH au Mans et Pierre à Paris. Tout part d’une impulsion individuelle : un riff, une ligne de basse, une ambiance… Dans la plupart des cas il s’agit d’une construction en binôme (Régis/Pierre) et à distance en s’échangeant des wav jusqu’à une structure de morceaux bien établie. Puis viennent ensuite les arrangements de Damien qui apportent la couleur et la vraie batterie de PH qui met la glu et la puissance. On se retrouve assez souvent vers le Mans pour nos résidences. Cette nouvelle approche nous permet d’expérimenter les meilleurs options sur chaque titre afin de les rendre le plus efficace possible. Chaque titre est maquetté avec une qualité très élaborée avant l’entrée en studio et chacun sait ce qu’il a à faire lors des prises de son. Un truc qui n'est pas négligeable aussi est que nous avons pu tester tous les titres de "The Art of Collapse" en live sur la tournée de "Great!". Cette étape nous a permis de reconsidérer certaines parties qui ne marchaient pas.
Nous attachons de plus en plus d’importance au chant
Le chant évolue encore dans ce nouvel EP, oscillant entre puissance et retenue. Comment travaillez-vous cette dualité vocale qui semble devenir une signature chez Visavis ?
Nous attachons de plus en plus d’importance au chant aussi bien sur les parties principales que sur les chœurs ou les contre-chants. Nous avons expérimenté les duos, la voix de Damien sur les couplets, celle de Régis sur les refrains comme sur le titre 'The Art of Collapse'. On ne cherche pas à faire du chant trop formaté. On le travaille beaucoup à l’instinct pour qu’il serve l’émotion du morceau, qu’il tape juste et qu'il embarque les auditeurs avec nous.

Quels ont été les partis pris de production pour "The Art of Collapse" ?
Nous voulions une production sincère, alignée sur ce que l'on réalise en live. Le parti pris a été de faire de l’home made avec un budget plus serré en optant pour un son plus "sale" et en intégrant des samples pour enrichir la dimension sonore de certains morceaux, comme sur 'We Dont Care' et 'The Art of Collapse'. Certaines parties ont été faites à la maison (basse, voix, post prod), d’autres au studio La boite à Meuh (batterie, mix, guitares). Par contre le mastering est toujours confié Thibault Chaumont (Deviant Lab) qui nous sublime toujours le rendu sonore. C’est une production qui reflète vraiment ce que l’on veut partager, tout en restant fidèle à notre ADN musical, entre rock, punk, metal et une touche d’expérimentation. Nous allons rester dans ce type de production à l'avenir.
Depuis "War Machine", vous semblez avoir enclenché une mue progressive vers un Visavis 2.0. Quel regard portez-vous aujourd’hui sur cette transformation ?
Effectivement, il y a eu un vrai tournant depuis "War Machine". On a senti le besoin de repartir sur des bases neuves, plus solides, avec une vision claire. Il a même été question à un moment de changer de nom tant ce nouveau VISAVIS était différent de l'original. Cette transformation, on l’a vécue comme une nécessité de tourner une page. On ne voulait plus juste rejouer ce qu’on avait été, mais construire un univers à part entière, avec un son moderne et une énergie qui nous ressemblent aujourd’hui. "War Machine" a marqué le redémarrage, "Great!", l’émancipation, et "The Art of Collapse" affirme vraiment cette nouvelle identité, plus sombre, plus lourde, plus habitée.
Vous êtes actifs depuis 1984, mais paradoxalement, c’est maintenant que vous semblez les plus professionnels, les plus structurés. Qu’est-ce qui a enclenché ce déclic après toutes ces années ?
C’est vrai, ça peut sembler paradoxal, mais aujourd’hui on est plus focus, plus structurés que jamais. Le déclic, c’est sans doute le retour en 2018. On savait qu’on voulait repartir, mais pas n’importe comment, la one again ne marche plus. Nous avons rapidement compris qu’il fallait absolument passer la vitesse supérieure et se professionnaliser si on voulait avoir une chance de reconquérir la scène actuelle inondée par une multitude de groupes tous très prometteurs. On a appris de nos erreurs (on en fait encore), des galères, des coups d’arrêt. Cette fois, on s’est donné les moyens : studio, label, orga, com… On a trouvé des financements, monté notre propre structure We Rock Loud parce qu’on voulait garder le contrôle tout en étant accompagnés par les bons partenaires, faire les choses à notre façon, mais sérieusement, avec qualité. On a toujours eu l’énergie, aujourd’hui on a aussi la pro attitude.
La pochette de "The Art of Collapse" frappe par sa force visuelle : un arbre nu, deux silhouettes suspendues entre ciel rouge sang et ruines urbaines façon "Planète des Singes". Quelle histoire raconte cette image ? Est-ce une métaphore de votre musique, une vision du monde en chute libre, ou un appel à s’accrocher malgré tout ?
Ce visuel c'est le reflet de notre monde plongé dans le chaos nous ramenant à l’instinct primaire représenté par ces 2 silhouettes mi-homme, mi-animal. Elles nous observent de loin en train de nous autodétruire, impassibles. Et peut-être qu’au bout du compte, si on ne réagit pas, il ne restera que ces silhouettes, les derniers témoins ou les premiers survivants.
Enfin, après toutes ces mutations, ces EP, ces réinventions… Qui est Visavis aujourd’hui ? Et que voulez-vous encore dire à la scène française et à votre public ?
Aujourd’hui, VV, c’est un groupe libre comme l'air et plus vivant que jamais. On sait qui on est, on sait ce qu’on veut dire, et on n’a plus besoin de rentrer dans aucune case. On trace notre route, avec notre son, notre groove, notre rage. On assume nos racines rock et punk, mais on est désormais solidement ancrés dans le metal - lourd, sombre, mais toujours habité. À la scène française, on veut dire qu’on est là, qu’on n’a pas dit notre dernier mot. Nous travaillons sur notre prochain EP sans doute pour une sortie 2026. Mais on veut dire aussi que c’est hyper compliqué pour un groupe comme le nôtre de trouver des dates aujourd’hui. On se bat pour exister dans un circuit ultra saturé, où les places sont chères et souvent verrouillées. On envoie, on relance, on relance encore, on y va à la force du poignet. Et même avec un EP solide, de bonnes critiques, une expérience, un univers bien à nous, faut prouver encore et encore. On n'a pas encore trouvé le bon partenaire qui peut nous faire avancer. Un tourneur, un label sont les bienvenus. C'est un chantier prioritaire pour nous pour la suite de notre histoire. Et à notre public : merci de nous suivre, de nous redonner cette énergie. On ne cherche pas à plaire à tout le monde, on veut juste toucher ceux qui sentent les choses comme nous : frontal, sincère, et sans filtre. Mais on ne lâche rien. On continue à chercher, à insister, à faire du bruit. Parce que la scène, c’est là où on est vraiment en vie. Et si personne nous ouvre la porte, on la défoncera!
Merci à vous !
Merci vivement à Music Waves pour cette interview hyper ficelée.
Plus d'informations sur http://werockloud-tour.com/visavis/?fbclid=iwar2px2mm3mc3z3wlrx7rxlj6yvijkaid_5oidtaktkmqqpajxxib4bds5gu
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