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TITRE:

LOHARANO (25 MARS 2023)


TYPE:
INTERVIEWS
GENRE:

ROCK ALTERNATIF



Music Waves part pour Madagascar à la rencontre des membres de Loharano, qui nous présentent leur dernier album en date. Rendez-vous aux sources du rock.
CALGEPO - 12.04.2023 -
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Madagascar est une ile pleine de ressources surexploitées. Beaucoup de sujets sociétaux préoccupent la population dont Loharano se fait le porte-parole. Music Waves voyage dans l'île devenue rouge pour évoquer "Lohamboto".

Le nom de votre trio a pour traduction "La Source". D’où vient la source de la création du groupe ?

Bonjour à vous et merci de nous avoir invités ! À la base nous étions des musiciens qui évoluaient chacun dans leurs groupes et genres respectifs, on se croisait surtout dans les concerts, essentiellement de rock/metal. C'était dans des discussions anodines que se ressentait cette envie commune d'élargir son horizon, son univers musical, pour enrichir sa propre musique, et surtout, une passion commune pour la musique traditionnelle. Le projet est alors né et nous essayions d'apprendre et de composer tout ce qui nous passait par la tête (soul, funk, etc mais surtout le roots). Néanmoins, nous étions des rockers, cette soif de riffs puissants, de rythmes agressifs, de son heavy, était présente en permanence, on ne pouvait pas, et on ne voulait pas s'en empêcher. Nous avons décidé de céder à nos pulsions et de combiner cela avec tout ce qu'on a appris depuis, ce qui a donné naissance à cette musique que vous nous entendez jouer actuellement.




Vous n'êtes
pas totalement inconnus en France car vous avez participé aux Transmusicales de Rennes en 2021, comment avez-vous vécu cette expérience et la réaction du public français ?

C'était fou ! À la fois une grande excitation, c'était notre première sortie à l'international, et on avait l'occasion de jouer devant un public plus ouvert à notre genre, mais aussi une grande pression, car finalement on ne pouvait rien prévoir, tout aurait pu aussi bien se passer que foirer, et c'était une grande étape pour notre carrière. À notre grande surprise, les réactions s'intensifiaient et la salle se remplissait à chaque fin de morceau. Le hangar était carrément plein à la fin du concert! La musique passait, les gens ont kiffé, c'était juste énorme !


On fait du rock à notre manière, et cette manière, c'est notre culture.

Votre album "Lohamboto" est d’orientation metal fusion et world. Vous y incorporez notamment des éléments trans dans la rythmique notamment (que ce soit la basse qui est bien présente et la batterie excellente – ‘Very’). En quoi la culture malgache enrichit-elle votre musique et vos projets ?

En tout ! Chaque personne, peu importe d'où elle vient, a son tempérament, sa manière de vivre, percevoir, exprimer ce qui l’entoure, c'est pareil pour nous, on a notre manière de chanter, notre manière de ressentir, d'exprimer, de vibrer, c'est tout. On fait du rock à notre manière, et cette manière, c'est notre culture.

Outre cet aspect instrumental, vous chantez en malgache sauf erreur, une manière pour vous de revendiquer à la face du monde que le rock malgache existe bel et bien ?

Il y a bien de ça : qui mettra notre culture en valeur à part nous-même ? On ne revendique pas, on montre, on se fait présents dans le monde. D'une autre part, on essaye de montrer à nos compatriotes qu'on peut faire quelque chose de bien en restant nous-mêmes, sans tendre à copier les autres pour se sentir en valeur et être évolué.




Est-ce à dire que vous allez continuer dans cette direction et ne pas faire de concession sur l’utilisation de cette langue, quitte à vous fermer un marché (comme a pu le faire par exemple the Hu, qui a cédé aux sirènes de l’anglais) ?

Jusque-là, principalement oui, mais l'inspiration ne se prévoit pas, peut-être pas tendre vers l'anglais carrément mais il se pourrait que ça arrive dans quelques parties de morceau, on verra.


Est-ce que vous rencontrez une difficulté à faire sonner ces paroles avec des mélodies rock (comme peuvent nous dire des groupes français qui écrivent en anglais, plus musical) ?

Pas vraiment, nos mélodies sont conçues pour accompagner le malgache. Chanter en malgache sur du
Cradle Of Filth, on pense que ça ne le fait pas trop. Notre recherche est surtout focus sur le fait de jouer la musique malgache de façon heavy, et non le contraire.


Ici on se bat contre des problèmes que vous avez résolus depuis bien des décennies

On sent que le metal et le rock représentent là-bas ce qu’il n’est plus ici. Il reste un mouvement revendicatif et contestataire, alternatif là où en Europe ou aux USA par exemple, il s’est embourgeoisé en perdant son aspect sociétal et underground (même s’il y a des groupes qui conservent cette essence). Votre album est bourré d’une forme de colère. Comment vous situez-vous par rapport à cela ?

On peut dire qu'ici on se bat contre des problèmes que vous avez résolus depuis bien des décennies, entre autres les droits fondamentaux de l'Homme, luttes primitives, réactions adéquates...


Il existe une scène metal importante à Madagascar avec de nombreux groupes historiques : Martz, Orthodox.. et plus récents Alina, Dymiz… Comment est perçu ce genre ici et souffre-t-il des mêmes clichés que l’on peut encore percevoir ici (alcool, drogue, bruit…) ?


La société malgache est particulièrement pleine de préjugés, personne n'est à l'abri des clichés. À part la musique tropicale et la variété malgache qui sont les plus populaires, le rock, le metal, comme le rap, le jazz, le reggae et autres sont littéralement incompris, ne se sont écoutés que par leurs passionnés (communautés très minoritaires) respectifs. Encore un grand combat pour la musique (sans le côté pop) à Mada.





L’album semble véhiculer beaucoup de colère mais aussi être l’expression d’une frustration. On voit avec notre prisme européen
que la situation à Madagascar est délicate politiquement, écologiquement... Est-ce que votre album est l'expression de tout cela (avec des titres comme 'Korontana' - ‘le Cahos’ - ou 'Mangina' - ‘Soyez Silencieux‘ sauf erreur de notre part) ?

Effectivement, nous Malgaches vivons dans une ère où on est en colère, on en a marre de tout ce qui se passe chez nous, rien ne va (mauvaise politique, écologie dégradante etc …) mais l'on ne peut rien revendiquer, on doit rester dans notre coin, on peut finir en tôle pour un rien, on ne fait que survivre et subir. Comment ne pas être frustrés …


Selon vous la musique ou les artistes ont-ils encore suffisamment d’influence pour éveiller les consciences ? Est-ce que vous le percevez suite à la sortie de vos albums auprès de vos fans ?

Bien sûr que oui, mais à condition que l'artiste puisse partager et se faire entendre. Nous concernant, on a
remarqué de par nos auditeurs, beaucoup plus de "oser parler, oser dire" et une hausse de fierté dans l'affirmation de soi.


Le son de l’album a quelque chose de spécial, garage, proche du public, sans artifice, comme votre formation basse, guitare et batterie, revenant à l'essentiel. C'est une forme de jusqu'au-boutisme, cette conception, une forme d’authenticité ?

On aime particulièrement dans le rock cet aspect brut mais qui défonce sa race! Particularité commune avec nombreux genres de la musique traditionnelle malgache, même africaine, plus orientés rythmique que mélodique, mais qui te mets en trans de ouf. On est aussi un peu dans cet esprit-là.


Parmi les titres les plus intéressants figure ‘Mangina’ qui ressemble dans sa construction à un titre de Led Zeppelin entre son couplet plutôt calme et son refrain très nerveux. Que représente ce titre pour vous ?

Mangina (Ndlr : "tais-toi"), c'est l'expression de cette rage enfouie qui te ronge de l'intérieur mais qu'on t'empêche délibérément d'exprimer. Dans le morceau, c'est l'histoire d'une femme qui s'est fait agresser et violer, et qui raconte que malgré ce qui lui est arrivé, c'est elle qu'on méprise, qu'on pointe du doigt, c'est elle que la société qualifie de honte ( la partie triste et dépressive ) et qui gueule au refrain "pourquoi me demandes-tu de me taire ?? Non, je refuse de me taire !!" car on lui demande de la fermer, on refuse qu'elle témoigne, qu'elle en parle, qu'elle se terre juste dans son coin. C'est plus une incitation à parler, revendiquer ce qui est juste, refuser l’oppression sociale.


‘Koronta’ qui termine votre album tutoie les 5 minutes au compteur et contient des breaks intéressants qui frôlent le progressif. Est-ce que ces éléments progressifs, de contrastes, sont des choses que vous souhaitez développer à l'avenir ?

Carrément, les nouveaux morceaux arrivent, vous nous en direz des nouvelles.


Mahalia a une voix qui colle parfaitement à la musique avec un phrasé très prononcé, comment travaille-t-elle sa voix qui est un instrument à part entière ?

Les exercices techniques sont à peu près les mêmes pour ceux qui pratiquent le chant, elle est plus focus dans son identité donc se concentre plus dans les recherches et d'un point de vue artistique, c'est toujours mieux de se sentir bien dans sa peau et oser pour pouvoir mieux s'exprimer.


On vous laisse le dernier mot pour nos lecteurs ?

Personne ne sera un Toi mieux que toi. Alors sois le meilleur Toi et fuck le reste !



Plus d'informations sur https://www.facebook.com/loharanoband
 
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