Depuis 2016, le groupe nord-irlandais The Answer avait disparu des radars. Plus d'album, le groupe de rock semblait avoir jeté la clé sous la porte pour le plus grand malheur des amateurs de rock généreux et émotionnel. 2023 arrive avec une bonne nouvelle, Cormac Neeson et sa bande se sont réunis pour une nouvelle cuvée "Sundowners'' dont il nous parle ici.
Nous nous sommes rencontrés en 2013 pour la promotion de "New Horizon". Après cet opus, vous avez encore enregistré deux albums mais plus rien depuis 2016, 7 ans! Vous avez dit que vous aviez eu besoin de faire un retour en arrière après "Solas" et la tournée qui a suivi, mais pensiez-vous que cette pause allait durer aussi longtemps ?
Cormac Neeson : Il ne faudrait pas oublier que nous avions commencé l'écriture et l'enregistrement de ce nouvel album juste avant l'épidémie du COVID, tout ce que nous avions prévu est arrivé en fait avec un retard de deux ans. Sept ans c'est un gros paquet d'années et nous-mêmes n'avions pas prévu que ce soit si long. Lorsque nous avions décidé de faire une pause, nous voulions retrouver un peu de notre espace personnel, nous n'avions rien en vue, juste pouvoir profiter des créations, de la vie.
Qu'avez-vous fait pendant cette ère de silence discographique ?
J'ai enregistré un album solo à Nashville. Quand je me suis retrouvé tout seul, mon premier réflexe a été d'écrire des chansons. J'ai aussi collaboré avec des artistes irlandais à Belfast. C'était pareil pour les autres. Beaucoup de projets créatifs qui étaient parfois un peu éloignés de ce que nous faisions, mais c'était assez enrichissant. Je pense que cet album a sans nul doute bénéficié de cette expérience que chacun de nous a rencontrée.
Peut-on dire que sans cette pause, le groupe n'aurait pu survivre ?
Difficile de le savoir ! Ce que je sais, c'est que cet album n'aurait jamais vu le jour sous cette forme. J'étais dans ce groupe depuis mes 18 ans, j'ai grandi avec ce groupe, nous avons fait des albums mais au bout du septième, on s'est rendu compte que nous étions enfermés dans la routine classique, enregistrement d'album/tournée/enregistrement d'album/tournée. Un cercle vicieux. Ce n'était pas pour nous motiver, loin de là, cela avait un aspect toxique sur le groupe. Il fallait prendre une décision. Et c'est comme ça que nous sommes partis chacun de notre coté, disparaissant de nos vies respectives en espérant se retrouver un jour ou l'autre.
Quand as-tu compris qu'il était l'heure de relancer le groupe ? Quel a été le tournant ?
C'était un appel téléphonique du label Golden Robot Records qui souhaitait nous offrir un contrat pour trois albums. Nous avons contacté notre manager, nous nous sommes réunis et nous n'y avons pas été par quatre chemins: "Est-ce que nous voulons vraiment nous lancer dans cette aventure? C'est le moment !" nous sommes-nous dit entre quatre yeux.
Mais si cette opportunité n'était jamais arrivée, est-ce que vous vous seriez réunis avec les autres membres pour réfléchir à un nouvel album ?
Je ne sais pas...
Donc The Answer ne te manquait pas à ce moment-là ?
Je ne pourrais pas dire qu’être dans
The Answer ne me manquait pas. J'avais la nostalgie de la musique que nous avions faite ensemble, cette fraternité que nous avions. C'était un peu triste, nous ne nous envoyions plus beaucoup de messages sur whatsApp. Une grande partie de mon identité était dans
The Answer, donc je ressentais ce sentiment bizarre depuis assez longtemps. Je pense que nous avons compris qu'il y avait toujours une étincelle de vie qui palpitait dans ce groupe. Tout ça a commencé par un appel téléphonique mais l'affaire n'était pas pour autant réglée. Il fallait encore se regarder les yeux dans les yeux et d’être d'accord sur la marche à suivre. On ne peut pas faire d'album et une tournée si on n'est pas à 100%.
On ne peut pas faire d'album et une tournée si on n'est pas à 100%

Le groupe est composé de quatre musiciens, très proches, comme une famille. Sans ces liens très forts, est-ce que tu penses que l'aventure aurait pu se poursuivre ?
La raison pour laquelle nous sommes là et étions ensemble avant la pause, c'est parce que nous étions amis mais en même temps quatre individus différents. Ce groupe est très important pour beaucoup de gens, de jeunes musiciens me demandent des conseils. Des fois, cela peut arriver de penser que tu n'es pas dans le bon groupe mais en prenant un peu plus de hauteur, tu te rends compte que la dynamique qui anime le groupe est centrale. Si tu enregistres des albums en solo, cela n'a aucun impact.
Peut-on dire que sans l'un de ses membres, The Answer ne pourrait pas survivre ?
The Answer pourrait survivre sans sa section rythmique (rires). Non je plaisante! Je ne pourrais pas imaginer le groupe avec d'autres personnes. Lorsque notre batteur James s'est cassé la main avant une tournée, on l'a remplacé par un excellent batteur, un gars qui venait de notre comté, mais avec une classe mondiale. Jouer avec lui était une bonne expérience mais cela me donnait l'impression que c'était un groupe très différent. Je pense que nos quatre individus forment l'ADN de
The Answer, son identité.
Nous savions très bien qu'il allait falloir assurer pour repartir de zéro

Comme nous l'avons dit, il y a eu un silence de 7 ans. L'industrie musicale évolue trop rapidement. Est-ce que vous pensez que vos fans se souviennent de vous ? Tu as dit qu'il fallait tout reprendre à zéro, est-ce que tu n'étais pas effrayé par un tel défi ?
Effrayé ? Non. Nous avions enregistré plusieurs albums et à chaque album, nous recommencions à chaque fois depuis zéro. Nous ne nous sommes jamais reposé sur nos lauriers. Nous aurions très bien pu nous dire: "Ce n'est pas grave, les fans vont acheter les albums et les tickets pour les concerts." Sur les plateformes de réseaux sociaux, les fans étaient actifs et postaient leurs chansons préférées de
The Answer, celles qui comptaient toujours à leurs yeux ainsi que de vieux concerts. C'était bien pour nous de voir les souvenirs de ces concerts, mais en même temps nous savions très bien qu'il allait falloir assurer pour repartir de zéro. Nous voulons composer de la musique pour notre
fanbase mais également pour toucher de nouveaux fans, ceux qui n'ont jamais entendu parler de nous auparavant.
Après avoir enregistré votre précédent album pour le label Napalm Records, vous avez enregistré "Sundowners" sur le label Golden Robot Records. Pourquoi ce label ?
Ils nous ont choisis ! Rappelez-vous du mystérieux coup de téléphone. C'était de la part du CIO de Robot Records. Mark Alexander nous a dit qu'il était un véritable fan de
The Answer, il nous a même parlé de certaines de nos chansons assez obscures. "C'est ma chanson préférée". Le contact était très facile. Il nous a fait une offre intéressante. Cela nous a permis de bien nous relancer.
Le titre "Sundowners" semble ironique et en plus il répond au titre de votre premier album "Rise".
Je pense que nous avons pris une approche naturelle pour enregistrer. Nous étions tous très heureux de nous retrouver ensemble pour écrire des chansons, enregistrer. Cela s'est fait spontanément, la confiance était au rendez-vous. Toute l'énergie et l'enthousiasme se retrouvent sur le titre éponyme.
Justement, est-ce que l'écriture et la composition des chansons se sont faites de manière rapide, l'approche était-elle différente sur les précédents albums ? Vous vouliez faire une pause pour pouvoir vous rafraîchir les idées, ce qui se ressent à l'écoute de l'album.
La pause nous a été profitable et le COVID nous a imposé un délai supplémentaire. Lorsque les restrictions ont été levées, nous nous sommes retrouvés en studio et avons fait une session de travail assez enrichissante pour enregistrer le plus possible en une semaine. Beaucoup d'idées, de session Zoom... De ma cuisine, je donnais et suggérais des idées à Paul, le guitariste.
Et à l'avenir, est-ce que cette expérience via Zoom pourrait-elle être reproduite ?
Je ne sais pas. Je ne sais pas où nous serons après cet album de retour. Le procédé fonctionne car nous sommes arrivés en studio avec plein d'idées au lieu de
jammer une semaine en studio. Cela nous a permis d'obtenir une clarté dans l'écriture et la composition des morceaux. On ne peut pas se cacher ainsi, il faut que les mélodies soient convaincantes, que les paroles soient solides.
"Solas", l'album précédent était un peu plus émotionnel qu'énergique. Le son de cet album semble plus direct, guidé par l'efficacité. Peut-on dire qu'il s'agit alors d'un retour aux sources ?
Oui, selon certains aspects c'est vrai. Mais ce n'était pas prévu comme tel. Nous avons beaucoup travaillé pour obtenir ce son. On s'est bien amusés, un groupe qui est content de se retrouver et qui s'exprime en musique. Mais cela reste assez frais avec les expériences vécues par les uns et les autres.
Pour cet album, vous avez travaillé avec le producteur Dan Weller, plus connu pour son travail dans le genre metalcore. Que vous a-t-il apporté musicalement et humainement ?
Nous avons fait une réunion Zoom avec plusieurs producteurs. La première chose que Dan nous a dit c'est :''J'ai produit beaucoup de groupes de metal mais j'adore votre musique. Et je sais que je peux faire un excellent album avec vous.'' Il nous a ensuite expliqué ses idées et nous avons très vite compris qu'il avait déjà trouvé des pistes que nous n'avions pas encore débusquées. Cette nouvelle approche a été très fascinante. Il possède un équilibre entre ce qui est faisable, ce qui est logique et la passion qui peut conduire un projet. Tous les matins, nous nous réunissions pour discuter ensemble de ce que nous allions enregistrer dans la journée. Parfois ça prenait un peu plus de temps, d'autre fois, c'était dans la boîte assez rapidement. Lorsque cela ne marchait pas trop, nous prenions tous chacun une pause, nous nous échangions les idées et ensuite nous repartions de plus belle. Il a crée une atmosphère de confort pour nous permettre d'enregistrer sans trop de stress. Il nous a vraiment montré qu'il était motivé par ce projet et je crois que l'on peut sentir ces ondes positives en écoutant l'album.
Des claviers juteux, des guitares qui éclairent les racines bayou d'un sol américain, un son peut-être plus américain que sur les précédents albums. Est-ce que vous êtes d'accord ?
Oui, nous voulions faire le meilleur album qui nous corresponde. Trouver le groove était important, il nous fallait être sur que les chansons avait le groove qui leur convenait pour éviter qu'elles ne tombent en pièces. C'était essentiel pour le genre de musique dont tu as cité les composantes, pour une musique avec un sentiment de dureté.
Le titre de cet album révèle toujours quelque chose à votre sujet et nous éclaire sur votre état d'esprit. Quel était celui-ci en 2023 ?
Un très bon feeling. Nous sommes meilleurs musiciens que nous l'étions par le passé. Nous étions contents d'avoir donné vie à ces chansons pour nos fans, nous avons retrouvé la magie des studios.
Avec ce grand album et la tournée à venir, qu'attendez-vous ?
Je ne sais pas encore.
Qu'espères-tu alors ?
J’espère que nous allons offrir de bonnes performances aux spectateurs et donner des coups de cœur à de gens qui ne nous connaissent pas encore. Que les gens écoutent cet album sans se soucier des albums passés, avec la fraîcheur du moment, qu'ils l'apprécient et que la musique les transporte.

Vous allez tourner en France ?
Oui en France, pas très loin d'ici je crois (Ndlr : à Savigny-le-Temple, à l'Empreinte et à Strasbourg).
On se retrouvera à Savigny. Merci beaucoup !
"Merci beaucoup" (en français dans le texte).
Merci à Childeric Thor pour sa contribution...