Nous
aimons commencer nos interviews sur Music Waves par la question suivante : quelle est la question que l’on vous a posée trop souvent ?
Diego Cafolla : Vous pouvez nous faire une présentation de l'histoire du groupe ?
Et nous ne vous la poserons pas !
Diego C. : C'est bien. En plus ces infos sont disponibles sur notre site web depuis des années.
La dernière fois que vous êtes venus en France en 2016, il n'y avait que 30 personnes dans la salle. Quelle est votre sentiment sur ce si petit nombre de spectateurs ?
Diego C. : Ça arrive parfois. Nous n'avons pas souvent joué en France. En fait, une seule fois avant ce soir-là. C'était il y a quelques années avec le groupe français Spheric Universe Experience. Dans d'autres pays nous avons plus de fans car nous y jouons plus souvent. Quoi qu'il arrive, nous donnons toujours 100% par respect pour les fans qui viennent nous voir, qu'ils soient 30 ou 300.
C'était seulement trois mois après les attentats du Bataclan. Pensez-vous que cette proximité fut l'une des raisons d'une si faible fréquentation ?
Diego C. : Oui, on peut le comprendre. Les gens ont été effrayés à cette période. Même pour nous, avant de monter sur scène nous y pensions, le choc était présent pour chacun d'entre nous. Mais une fois sur scène on ne pense plus à ça, heureusement.
Kingcrow est un groupe de six membres mais vous n'êtes que cinq aujourd'hui. Pourquoi ?
Pour le concert de Rome avec PoS nous étions six, mais Christian, notre clavier, est très occupé avec sa vie privée et il ne peut pas nous accompagner pendant toute la tournée.
Du coup, comment faites-vous pour les parties de claviers, qui sont importantes dans votre musique, sur scène ?
Diego C. : Nous utilisons des sections enregistrées et programmées que nous déclenchons sur scène au moment opportun, c'est la seule solution pour éviter de se passer du clavier, ce qui n'est pas une option.
Une tournée avec Pain Of Salvation va vous apporter une exposition exceptionnelle vers le public pour votre nouvel album. Parlez-nous des opportunités qui vous ont conduit à cette aventure.
Diego C. : Nous tournons avec Pain Of Salvation parce que nous avons le même promoteur. Et puis c'était un timing parfait avec la sortie de notre album début septembre, donc notre équipe de management y a vu une opportunité naturelle. Nous avions déjà tourné avec PoS aux États Unis il y a quelques années car nous partagions déjà avec eux une autre même structure du promotion.
Pour "The Persistance", nous avons eu une pré-production complète
Daniel chante un titre sur votre album (NDLR : 'Night's Descending'). Cela veut-il dire que Kingcrow fait partie désormais du cercle fermé avec lesquels Daniel chante ?
Diego C. : Oui (Rires) C'est un truc de dingue, car Daniel est l'un de mes chanteurs préférés. Dès que j'ai écris la chanson, je me suis dit que sa voix marcherait parfaitement avec la mélodie. Diego l'a chantée et nous nous sommes dit que nous allions demander à Daniel car ce serait juste parfait. Je lui ai envoyé la chanson, il l'a beaucoup aimée et il a accepté. Il a fait ça en quelques jours dans son studio. Et quand il m'a renvoyé la chanson enregistrée, il n'y avait rien à toucher c'était parfait. C'était même encore mieux que ce que j'avais imaginé.
Est-ce qu'il lui arrive de venir la chanter avec vous sur scène pendant la tournée ?
Diego C. : En fait c'est arrivé une seule fois, hier (NDLR : le 17 septembre 2018) lors de notre concert à Pratteln en Suisse.
Et ce soir ?
Diego C. : Hé, je ne sais pas. Ça s'est décidé seulement quelques minutes avant le début du concert. Nous avions un peu plus de temps que d'habitude pour les balances et Daniel a proposé de nous accompagner.
(NDLR : Diego Marchesi, le chanteur nous rejoint)
Vous avez annulé votre participation au ProgPower USA (NDLR : à Atlanta du 4 au 7 septembre), était-ce pour pouvoir faire cette tournée en Europe avec PoS ?
Diego C. : Non. Tout le monde pense que c'est la raison, mais lorsque nous avons annulé nous ne savions pas encore que nous ferions cette tournée en Europe à ces dates-là. Nous avons été contraints d'annuler pour des raisons personnelles. Nous sommes désolé pour les fans des USA.
Venons-en à votre dernier album, "The Persistence". Combien de temps vous a pris cet album entre l'écriture, la composition et l'enregistrement ?
Diego C. : Écrire l'album nous a pris environs six mois et trois mois de plus pour l'enregistrement. En fait, l'album était terminé l'année dernière en novembre. Mais nous avons du changer de management et ça a pris pas mal de temps. En plus cette fois nous avons eu une pré-production complète, c'est à dire que nous avons enregistré une première fois au format "demo" avec tous les arrangements, puis nous avons ré-enregistré pour l'album tel qu'il est.
Qui a écrit les textes de l'album cette fois ?
Diego Marchesi : C'est moi qui ait tout écrit cette fois. Sur les précédents albums nous travaillions ensemble, mais pour "The Persistence" Diego s'est concentré sur la musique et je me suis chargé des paroles.
Diego C. : Diego écrit les paroles et nous les adaptons les textes et les mélodies.
Diego M. : Et c'est un sacré boulot (Rires). Oui, nous arrangeons parfois les paroles et les lignes vocales en modifiant parfois légèrement l'un ou l'autre au fur et à mesure pour ça fonctionne parfaitement comme nous le sentons au fil de l'écriture de l'album.
J'ai écrit 'Folding Paper Dreams' autour de ce que Manuel avait improvisé la veille à la batterie.
Qui a le dernier mot et dit "stop" ?
Diego C. : C'est moi, car je suis également le producteur. Nous en discutons bien sûr, mais au final il faut trancher sinon, nous y passerions des années. La production impose d'avoir une vue globale du travail qui reste à effectuer, si tel arrangement fonctionne ou pas. Parfois ça ne sonne pas comme nous voudrions et nous retaillons certaines parties, mais il faut savoir arrêter quand nous avons quelque chose qui correspond à ce que nous cherchons à créer.
Comment vous répartissez-vous les rôles entre Ivan et Diego pour les sections de guitares ?
Diego M. : Les belles parties sont pour Ivan (Rires) et Diego prend les plus moches (Rires) !
Ivan Nastasi : Tout ça se fait de manière très naturelle parce qu'avec Diego (Ndlr : Cafolla) nous jouons ensemble depuis 17 ans. Nous partageons les solos, les riffs, les rythmiques. Seules les sections de guitare acoustique sur scène sont exclusivement pour moi. Quand nous écrivons des sections de guitares nous avons tout de suite ce qui sera pour moi et ce qui sera pour Diego. Mais c'est vrai que quand c'est plus technique, c'est souvent pour moi.
La section rythmique, et particulièrement la batterie, a évolué au cours des albums et revêt une importance essentielle dans les ambiances et le son du groupe.
Manuel Cafolla : Oui, la batterie a une grande importance dans notre musique. Nous travaillons beaucoup la batterie en pré-production, à tel point que pour chaque section nous essayons beaucoup d'approches rythmiques différentes. Nos chansons renferment des parties rythmiques complètement différentes et nous passons beaucoup de temps à essayer des rythmiques différentes sur telle ou telle section ce qui change parfois fondamentalement le morceau.
Diego C. : À nous de sentir ce qui correspond le mieux à chaque section et quand nous essayons la bonne variation nous le savons tout de suite, comme une évidence.
Diego M. : Nous sommes encore plus sévères et rigoureux sur le travail de la batterie car il est effectivement un élément essentiel notre musique. C'est d'ailleurs le premier instrument que nous enregistrons.
Diego C. : Par exemple, un jour que Manuel essayait différentes choses dans le studio, j'ai enregistré et la nuit suivante, j'ai écrit 'Folding Paper Dreams' autour de ce qu'il avait improvisé la veille. Le morceau est né du rythme qu'a joué Manuel ce jour là.
Votre musique a évolué d'un pur metal progressif vers un style plus atmosphérique. Avez-vous des influences de ce style lorsque vous composez ?
Diego C. : Non, en fait lorsque je compose je ponds pas mal de trucs nuls, beaucoup même. Mais lorsque, dans cet océan de m..., vous entendez quelque chose qui vaut le coup, vous vous dite "ah, ça c'est pas mal, travaillons là-dessus". Ce n'est qu'une fois le morceau terminé que l'on se dit "Tiens, là ça ressemble à tel ou tel style ou groupe". Mais habituellement c'est un mélange de choses très différentes puisque chacun de nous écoute et aime beaucoup de styles de musiques très différents. Mais au début du processus, je ne me dis jamais que je vais aller dans un style d'influence précis.
Plusieurs titre de "The Persistence" nous ont fait penser à Anathema, particulièrement l'intro du morceau titre.
Diego C. : Nous aimons beaucoup Anathema et, en effet, l'intro au clavier et le riff de début, je comprends. C'est un gimmick de battement réduit au piano Rhodes assez récurrent dans le rock atmosphérique ou trip-hop comme chez Massive Attack, mais le reste du titre est assez différent. Je le rapprocherais plus de Portishead pour l'aspect trip-hop. Dans ce cas, c'est plus une sorte d'influence commune que directement depuis Anathema. Mais l'analogie nous plait bien car nous aimons beaucoup et avons un grand respect pour leur travail et leur carrière.
Cet album est différent avec plus de refrains et de constructions classiques, enfin presque ...
L'album comporte des ambiances plus calmes et plus sombres que précédemment. Est-ce une volonté de vous éloigner d'un metal progressif traditionnel ?
Diego C. : Eidos marquait la fin d'une trilogie de trois albums très différents mais avec une ligne commune utilisant souvent des guitares acoustiques et des sonorités spécifiques au groupe. En passant à autre chose nous voulions essayer quelque chose de différent mais ce n'était pas planifié, c'est juste arrivé. Si notre musique a évolué, c'est que nous aussi.
Diego M. : Nous avons fait cette fois quelque chose de différent avec plus de refrains et de constructions classiques, en presque ... . Ce sont peut-être plus des chansons que des morceaux mais avec des ambiances plus marquées.
"The Persistence est un album très mature ...
Diego M. : ... parce que nous sommes plus vieux ! (Rires).
Comment jugez-vous l'évolution de la musique de Kingcrow depuis vos débuts ?
Diego C. : Nous avons commencé très jeunes. Au début, nous étions très influencés par le metal. Croyez-le ou pas, nous avons débuté comme un groupe de death metal. En grandissant, différents styles ont influencé notre écriture. Rien n'était planifié.
Diego M. : Rien que sur les quatre derniers albums, notre musique a énormément évolué. Peut-être même plus que lors des dix premières années.
Diego C.: L'album "Timetropia" a été important dans l'évolution de notre musique. Il avait un côté expérimental, un peu bordélique même. C'est à ce moment-là que nous avons incorporé des claviers, des guitares acoustiques et des constructions progressives, annonçant les avancées constatées sur "Phlegethon".
Riccardo (Ndlr : Nifosi - Basse) semble avoir toujours fait partie du groupe mais n'est là que depuis deux ans. Comment l'avez-vous recruté ?
Diego M. : Avec beaucoup d'argent ! (Rires)
Diego C. : En fait, nous nous connaissions déjà depuis plusieurs années. Avant l'enregistrement nous avons essayé trois autres bassistes mais ça n'a pas marché. Il nous fallait trouver un gars capable d'une palette de jeu très large. Riccardo jouait dans un autre groupe et Manuel a proposé de l'essayer et ça a fonctionné immédiatement.
J'aime beaucoup le progressif 'Folding Paper Dreams' étrange et déstructuré.
Quel est votre titre préféré sur l'album ?
Diego M. : Nous nous battons souvent sur ce sujet. En ce moment, le mien est 'Perfectly Imperfect'. Toutes les parties avec des chœurs sont très agréables car nous jouons ensemble et nous voulons "sonner" ensemble. C'est beaucoup de travail mais cela permet d'apporter plus de profondeur que ma simple voix qui peu sonner un peu pop parfois.
Riccardo Nifosi : 'Father' est celui sur lequel je préfère jouer, très groovy. Mais celui que je préfère écouter est 'Every broken Piece Of Me'
Ivan N. : 'Folding Paper Dreams' mais celui que je préfère jouer est 'The persistence' qui est très catchy pour ma partie.
Diego C. : 'Perfectly Imperfect' pour sa profondeur et la beauté des chœurs et j'aime beaucoup le plus progressif 'Folding Paper Dreams' étrange et déstructuré.
Manuel C. : 'Folding Paper Dreams' mais 'Closer' est le plus proche de mon style de jeu.
Quel est votre meilleur souvenir en tant qu'artiste ?
Ivan N. : Je me souviens d'un concert où nous jouions 'Phlegethon' au Progpower Europe, au moment chœurs j'ai entendu le public reprendre le refrain avec nous. C'était un grand moment d'émotion.
Diego C. : C'était l'un des premiers moments de reconnaissance internationale, dans un pays étranger, la foule qui chante avec nous, wow !
Entendre le public reprendre le refrain avec nous. C'était un grand moment d'émotion.
Et au contraire le pire ?
Diego M. : Probablement un show à Milan où nous avons du batailler avec d'autres groupes italiens quelque peu jaloux de notre notoriété grandissante, l'ambiance était détestable.
Nous avons commencé avec la question que l'on vous a trop souvent posée. Quelle serait celle que vous aimeriez que l'on vous pose ?
Diego C. : Quelle drôle de question ! Hum ... Comment avez vous fait pour vendre un million de copie de votre album "The Persistence" ? (Rires)
C'est tout ce que l'on vous souhaite. Quelque chose à ajouter aux lecteurs de Music Waves ?
Diego C. : Venez découvrir le groupe. "The Persistence" est en écoute gratuite sur Bandcamp, vous pourriez y trouver une musique qui vous plaira.
Diego M. : J'aimerais ajouter que nous sommes ravis de faire trois concerts en France où nous n'avons jamais eu l'occasion de faire plus d'une date.
Un dernier mot en français pour nos lecteurs ?
Ivan N. : Bonsoir et merci !
Merci à Calgepo pour sa participation.