Séduits par une édition 2017 qui
fut une réussite nous sommes de retour à Izegem pour la septième édition
du Headbanger’s Balls Fest. Le lieu n’a pas changé, dans la toujours très
agréable salle De Leest, située au cœur d’un ensemble culturel qui pourrait
faire rougir de jalousie pas mal de villes françaises. Cerise sur le gâteau, le
festival est complet depuis quelques jours et confirme un succès important, de
quoi là encore rendre jaloux des organisateurs français ayant bien de la peine
à attirer du public. Pour cette édition, 8 groupes sont programmés dans une
belle variété de styles.
Preuve de l’engouement du public :
la salle est déjà quasi pleine quand Growing
Horns débarque en début d’après-midi. Les Belges œuvrent dans un doom qui
aime les longues plages instrumentales et une facette mélancolique teinté de
funeral proche du son de Paradise Lost de ces dernières années. Cela va donner
un concert d’une grande intensité, malgré l’horaire matinal cela ne va
pas refroidir l’ambiance. D’entrée avec ‘We’re All Made Of Stars’ le ton est
donné avec un riff pachydermique et le chant hurlé d’un Dafus possédé par ses
paroles. Dans le chant on apprécie aussi des passages en clair très forts.
Derrière l’enchainement est parfait avec ‘Luciferian Kingdom’ puis ‘Mountains
Of Pain’. Le groupe maintient une énorme
pression sur le public et l’écrase avec force. L’impression de ressentir la fin
du monde et palpable et le riff doom death de ‘Mountains Of Pain’ aura fait impression
avec cette rage si forte mixée à un côté mélancolique digne de My Dying Bride.
En fin de concert ‘Motherbong’ et ‘Big Fat Nun’ auront été tout aussi efficaces. Growing Horns a lancé la journée de
manière parfaite, sa prestation a été profonde et a séduit plus d’un
spectateur.

Avec Fire Down Below nous allons voguer vers des terres stoner chargées
de psychédélisme. Avec ‘Roadburner’ pour débuter il n’y a pas de doute sur
l’esprit - riff bien gras, groove 70’s et voix chaleureuse
trempée dans le meilleur du genre. Le ton est haut perché et planant, nageant
dans un esprit proche de Monster Magnet avec un feeling intense et faisant apprécier
ces riffs et soli stoner. Extrait du nouvel album, ‘Saviour Of Man’ confirme
cette impression, le public apprécie outre la face stoner un côté rock
alternatif savoureux. Le côté gras fait toute la force de la chanson et lui
amène sa puissance. Ensuite avec ‘Universes Crumble’ puis ‘Adrift In A Sea Of
Stars’ le concert se transforme en voyage, avec de longues plages
instrumentales teintées de progressif et un chant pur et émotionnel donnant au
concert des allures de transe hypnotique.
Ce côté planant est rempli de feeling et le petit passage de percussions
va contribuer à amener cet aspect 70’s. Enfin sur plus de 10 minutes ‘The Mammoth’ va conclure les hostilités en
beauté, fort d’une énorme montée en puissance il va achever un public sous le
charme avec intensité et un chant habité prenant. Fire Down Below a donné un
concert de classe et d’un charme vénéneux. La claque a été énorme, tout le
monde a apprécié la force de ce stoner qui a su faire voyager loin des réalités
et des contrariétés.

Avec Guilty As Charged la salle va afficher complet. Les premiers rangs
sont blindés et il est difficile de se frayer un chemin dans cette foule. Il
faut dire que le groupe est un habitué et qu’en matière de heavy thrash il est
un client sérieux qui sait tenir une scène. Pour ce concert il nous présente
son nouveau bassiste et tout de suite avec ‘Pedal To The Metal' il met le feu. On ne
peut que tomber sous le charme de cette musique puissante mais accrocheuse et
mélodique. Le chant feutré de Jan fait aussi beaucoup pour la force de
l’ensemble, il sait faire parler la puissance mais garde un côté accrocheur
irrésistible. On pense bien sûr à Metallica avec cet art maitrisé du riff qui
scotche au mur. Ensuite avec ‘Preach To The Masses’ le groupe confirme cette
aisance pour le heavy thrash et donne la leçon avec la classe qu’un Iced Earth.
Derrière en vrac avec ‘Leap Of Faith’ et son riff énorme, le petit nouveau
‘Feel The Rage’ très prometteur dans cette même lignée musicale il donne une claque
à un public conquis. Tout cela donne envie de se remuer méchamment et la fosse réagit bien. La deuxième partie est
tout aussi jouissive. Que ça soit avec ‘I’ll Never’, ‘Rise’ ou encore ‘Down The
Mainline’ on ne peut qu’être scotché par ces claques sonores portées par des
refrains parfaits. Le final sur ‘Lonewolf’ sera dantesque avec une superbe
partie instrumentale parfaitement maitrisée. Guilty As Charged a frappé un grand coup avec ce concert
intense et très apprécié. Il a montré
une maturité impressionnante, clairement il a les armes pour grimper les
échelons.

Avec Off The Cross nous partons dans des contrées metalcore. Passer
après de si bonnes prestations et avant le cœur de l’affiche n’a rien de simple
mais cela ne va pas impressionner la formation belge elle aussi habituée des festivals
de la région. Le groupe ne va pas perdre de temps et démarrer à toute allure
avec ‘Passenger’, avec une grosse rythmique, un sens du riff qui marque
et la grosse voix typique. Tout cela fait remuer la tête et évoque l’efficacité
d’un Trivium. ‘Divided Kingdom’ confirme la force du groupe pour manier la
sauce métalcore.’Megalomaniac’ frappe encore plus fort, il a un petit côté
graisseux plaisant et déménage méchamment tout en gardant cette force mélodique.
Ce côté à la fois puissant et accrocheur marche et le groupe va chercher un
public qui lui répond dans une salle chauffée à blanc. La suite du concert va
enfoncer le clou, ‘Book Of Doom’, ‘Prophet’ ou ‘Red Seas Flowing’ sont taillées dans le
meilleur du genre et montrent encore une fois une rythmique de feu. Au chant
Steven épate par sa capacité à évoluer entre growl féroce et aspects plus
accrocheurs tel qu’on le pratique dans le metal moderne. La partie n’était pas
gagnée d’avance mais Off The Cross
l’a gagnée avec un brio certain. Il a assuré un show de grande qualité et a su
convaincre le public qu’il était un client sérieux dans le genre.

Avec Avenging Benji les organisateurs vont
ravir plus d’un nostalgique. Derrière ce nom se cache Ben Jackson, l’ex
guitariste de Crimson Glory. Discret depuis la mise en stand by du groupe en
2012 il s’est lancé dans une carrière solo. Pour le concert il s’est allié à
Wade Black, chanteur de Crimson Glory après la disparition de Midnight pour
rendre hommage à ce dernier. En début de concert, Ben officie au chant et
propose deux titres de sa carrière solo dont le très bon ‘Out For Blood’ dans
un pur esprit metal progressif. Ben est en forme et distille
d’excellents riffs et soli. Après cette mise en bouche les fans vont être aux anges avec l’arrivée de Wade Black. Certes il n’est pas le
chanteur phare du groupe mais il a su s’approprier les grands titres et a œuvré
sur un "Astronomica" de très bonne tenue. Et il va mettre tout le monde d’accord.
Il a gardé ce timbre haut perché maitrisé et on ne peut qu’apprécier ce prog à la
fois costaud techniquement et sachant se faire mélodique. Ben et ses hommes
parcourent la carrière du groupe avec classe et tous les albums de l’ère Jackson sont représentés. Le premier avec ‘Azrael’ ou ‘Dragon Lady’ et ‘Valhalla’, "Astronomica" avec son
titre éponyme ainsi que ‘Edge Of Forever’. Et bien sûr l’énorme "Transcendence"
est le plus à l’honneur avec des pépites comme l’intense ‘Masque Of The Red
Death’, ‘In Dark Places’, ‘Red Sharks’, ‘Where Dragons Rule’ et ‘Lonely’. Tous nous rappelant à quel point
le groupe était en avance avec son metal progressif classieux. L’accueil est
chaleureux et on sent Wade et Ben heureux d’être là pour rendre hommage au
talent de Midnight. Avenging Benji a proposé un excellent concert à la fois fort et
prenant. Il a fait revivre la légende Crimson Glory pour le plus grand plaisir
de tous et il faut remercier les organisateurs pour ce moment fort.

Après ce superbe moment, place à King Hiss ! En deux albums, les Belges se
sont fait connaitre dans leur pays et au-delà avec leur stoner rock et des
prestations brulantes. Devant un parterre rempli le quatuor va faire honneur à
sa réputation, d’entrée il impressionne avec ‘La Haine’, envoyant un stoner rock groovy teinté de
charme 70’s porté par un Jan au timbre plein de cette gouaille qu’on aime. Tout
cela donne envie de taper méchamment du pied et la suite du concert va
confirmer le talent du groupe pour ce hard rock chaud et accrocheur. ‘We Live
In Shadows’ puis ‘Serpentagram’ font parler la poudre avec des riffs puissants,
l’ensemble est bouillant d’intensité et le public répond à merveille.
L’ambiance ne va cesser de monter, l’intro à cappella de ‘King Hiss’ est un
superbe moment de feeling suivi par une nouvelle claque stoner. La suite va être toute aussi forte, le groupe
a un large temps de jeu, digne d’une tête d’affiche, et il va montrer qu’il le
mérite. Que ça soit avec ‘Sadlands’, ‘Snakeskin’ ou ‘Mastosaurus’ et ‘Killer
Hand’ le succès ne se dément pas dans une salle brulante comme rarement avant
dans la journée. Le final sur ‘Homeland’ est tout aussi bon et achève un
concert de grande classe. King Hiss
a fait un sacré numéro, son hard stoner était chaud comme l’enfer et digne des
plus grands du genre, Monster Magnet en tête. Il a fait forte impression et a
su parfaitement ouvrir la voie aux très attendues têtes d’affiches.

La première nous vient des
Etats-Unis et est un grand nom de la scène thrash. En attirant Flotsam & Jetsam dans ses filets
les organisateurs ont réussi un beau coup. Certes le groupe n’a plus l’aura de ses
deux premiers albums, "Doomsday For The Deceiver" et "No Place For Disgrace"
qui ont contribué à écrire l’histoire du thrash. Mais il est toujours respecté
et reste une valeur sûre en live pouvant toujours compter sur deux anciens, le
chanteur Eric A.K. et le guitariste Michael Gilbert. Même si deuxième sur l’affiche, le
groupe a soigné son décor et va montrer une face très professionnelle en
proposant un concert d’une sacrée puissance. Il dispose d’une heure de jeu et ne
va pas en perdre une miette sans chichis ni discours inutiles avec juste ce
qu’il faut pour remercier les fans. D’entrée il
envoie la sauce avec une puissance énorme. Eric est en pleine forme avec un
timbre aiguisé et derrière les riffs et soli thrash déboulent dans tous les
sens. Le groupe arrache tout sur son passage et fait mal aux cervicales des
spectateurs. Derrière l’enchainement ‘Dreams Of Death’ et ‘Desecrator’ va impressionner, ça galope sec dans un esprit thrash old school jouissif. Ces chansons ont pas loin de 30 ans mais
n’ont pas vieilli. ‘Hammerhead’ confirme, le ton est speed et puissant et le
public répond à cette leçon avec énergie. La suite du concert va être tout
aussi intense et on aura pu aussi apprécier un titre plus récent avec ‘Iron
Maiden’, bel hommage à la Vierge de Fer qui a déclenché des slams et pogos. La
fin de concert est bouillante et avec l’antique ‘I Live You Die’ puis ‘Doomsday
For The Deceiver’. Le ton est ébouriffant avec une force technique
impressionnante. Flotsam & Jetsam
a donné ce soir une prestation explosive, il est encore très frais et résiste
au temps avec classe. Devant une salle comble il s’est rappelé au bon souvenir
de plus d’une personne.

La tête d’affiche vient de Grèce, Rotting Christ permet au festival de
s’ouvrir à un style plus extrême. Le groupe va faire souffler dans la salle un
vent violent qui va en surprendre plus d’un. Le groupe vient de sortir un best
of parfait résumé d’une carrière qui depuis 30 ans et 12 albums a mixé black et
heavy avec une touche occulte et mystique. Ces dernières années il a mis à l’honneur
la culture grecque avec une force intense et un côté sataniste. Les musiciens
vont prendre le temps de se caler, le tout devant un décor superbe. Il est tard
mais le public remplit largement la salle et quand l’intro majestueuse retentit
tout le monde retient son souffle avant la tempête. Rotting Christ va proposer
un concert basé essentiellement sur ses 3 derniers albums avec en parallèle
quelques extraits de son début de carrière. Avec ‘Ze Nigmar’ il va se faire
envoûtant, le son est clair et puissant et le charisme dégagé par Sakis en
impressionne plus d’un. Ce titre doté d’une montée en puissance parfaite est
idéal pour débuter. Derrière le rythme va s’accélérer avec un ‘Kata Ton Demona
Fautou’ en forme de claque. L’intensité en scotche plus d’un avec une facette
black appuyée grâce à une batterie énorme et un chant habité incroyable de
force. Sakis chauffe un public qui lui répond avec force et derrière il ne
relâche pas la pression avec ‘Demonom Vrosis’, qui
confirme la force de ce heavy black avec un riff énorme et une conviction prenante
dans le chant.

Le début a été dantesque et cela
ne fait que commencer. Avec ‘Elthe Kyrie’ Rotting
Christ revient vers "Rituals" et la noirceur va s’accentuer. Porté par des
chœurs, ce titre est un immense moment de puissance au refrain intense qui nous
fait basculer du côté obscur. Ce n’est pas ‘Apage’ Satana’ qui va nous en faire
revenir. Avec des airs de messe noire, un chant parlé très fort, il se fait noir
de chez noir et amène une face occulte attirante et malsaine. Les chœurs et la
batterie amènent un côté tribal fascinant. Le public est à la fois groggy et en
transe et l’enchainement qui arrive va
enfoncer le clou. Rotting repart 25 ans en arrière vers "The Mighty Contact" et
nous en balance ‘The Sign of Evil Existance’ et ‘Transform All Suffering Into
Plagues’. Ces titres antiques vont mettre le feu, le premier est un
tube doté d’un refrain énorme porté par le chant profond de Sakis.
Musicalement les deux tabassent sans faire de concessions. La fosse commence à se
remuer et la suite, toujours old school
avec ‘The Forest Of N’Gai’ sorti de "Passage To Arcturo" de 1991, va amener un
cran de plus à l’ambiance. Lourd et très extrême c'est un uppercut
impressionnant, puis Sakis rend hommage à la fidélité du public et
‘Societas Satanas’, repris de Thou Art Lord son projet parallèle, déclenche des
mosh pit furieux, et un wall of death va remuer la fosse. Ce titre occulte est
une merveille taillée pour la scène avec un refrain gigantesque et un côté
tribal mystique. Le concert entre dans sa dernière ligne droite, il est tard
mais personne n’a envie que tout cela s’arrête. Avec ‘In Yumen-Xibalba’ la
furie ne va pas se calmer. Ce long titre est écrasant de force et doté
d’ambiances glaciales comme autant d’odes au Malin. Le chant
de Sakis est précis et appuyé comme s'il prononçait un discours. Le côté
majestueux va encore plus s’affirmer avec un ‘Grandis Spiritus Diavolos’ qui
porte bien son nom. Entre les samples, un riff énorme et une force si
présente, occulte, il fait un carton, la fosse est de nouveau en feu remuant dans
tous les sens.

Rotting Christ revient ensuite sur l’immense "Triarchy Of The Lost Lovers" avec son titre
d’entrée, ‘King Of A Stellar War’. Plus heavy et épique il reste un classique avec un refrain
qui tue et une force énorme. Le public est à fond dedans et lève les bras dans
un joli moment de communion avec le groupe. C’est avec ‘Noctis Era’ que le
concert va provisoirement se conclure. Cet extrait de "Aealo" est d’une intensité incroyable, les Fire repris en chœur donnant
même un petit frisson, et s’avère parfait pour une fin endiablée. Après un court
passage en coulisse le groupe reprend d’assaut la scène sous les vivats et
après une courte intro glauque il balance un ‘666’ qui fait son effet ; cet
extrait de "Kata Ton Daimona Eaytoy" mérite son nom, il est teinté d'un mysticisme qui fait la force de cet album. Enfin le groupe propose
son titre emblématique avec ‘No Serviam’ tiré de l’album référence du même nom.
Servi par un refrain encore une fois remarquable le titre est un hymne idéal pour clôturer le set. Avec ce concert Rotting Christ a fait très largement
honneur à son statut de tête d’affiche, le groupe grec a confirmé avec éclat qu’il
restait une valeur sûre en live, capable de transporter son auditoire.

La journée a été une réussite
totale pleine de concerts chauds servis par des groupes au top de leur forme. Le
Headbanger’s Balls Fest est un festival à taille humaine sympathique et
parfaitement organisé et il a su cette année encore nous ravir par la qualité
de son affiche. Il nous reste à remercier les organisateurs pour la qualité de
leur accueil et leur donner rendez vous rapidement pour d’autres évènements métalliques.