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TITRE:
SELIM (07 NOVEMBRE 2014)
TYPE:
INTERVIEWS
GENRE:
ROCK
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A l'occasion de la sortie de "Maison Rock", Music Waves a rencontré Selim pour faire le point sur ce premier album intime et riche placé sous le signe de l'expérimentation, du passé et de la famille...
STRUCK
- 21.11.2014 -
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Première interview champêtre dans la carrière de Music Waves... C'est allongé dans les jardins du Luxembourg que nous avons rencontré Joseph Chedid alias Selim, artiste aussi attachant et sensible que détendu et libre pour évoquer son envie de faire de la musique enfin assumée à travers cet album...
Quelle est la question qu’on t’a trop souvent posée ?
Selim : La question qu’on m’a trop posée ? Hum (Silence)…
Il n’y en a peut-être pas ?
Tu as peut-être raison…
Malgré tout, je suis convaincu qu’à chaque interview doit revenir la question de la filiation.
En même temps, je pense que c’est un peu inévitable dans le sens où les gens ont besoin de repères qui les rassurent… Après savoir si je n’en ai pas marre ? Oui, c’est parfois un peu agaçant, vexant d’être comparé mais c’est tellement humain… Après je débute donc il faut laisser le temps aux choses de se construire. Aujourd’hui, les gens commencent à à peine à s’intéresser à moi.
"J’ai pris le temps, j’ai expérimenté dans mon coin et il en ressort ce
disque qui est une photo de toute une époque de ma vie mais également un
hommage à ma famille"
Cette filiation semble avoir une incidence sur ta vie musicale. Si la richesse de ton univers, ta voix sont indéniablement issue de l’héritage de ta famille… en revanche, est-ce que cette filiation n’a pas été castratrice expliquant que "Maison Rock" soit seulement ton premier album à 28 ans ?
D’une certaine manière si je fais mon premier disque à 28 ans, c’est qu’il y a une raison : j’ai pris le temps, j’ai expérimenté dans mon coin et il en ressort ce disque qui est une photo de toute une époque de ma vie mais également un hommage à ma famille, à ce que j’ai appris et vu. Cet album était une manière de sortir de l’ombre et de formuler quelque chose d’assez brut.
Ce disque s’appelle "Maison Rock" : "Maison" évoque un terrain connu lié à la famille et "Rock" pour le côté écorché, sauvage qui fait du bruit et qui a envie de crier… Il est très particulier et je pense que le deuxième sera très différent.
T’es-tu imposé un certain niveau d’exigence et de différenciation par rapport à ta famille en expliquant que tu t’es formé sur scène. Il en ressort le côté brut que tu as évoqué tout à l’heure pour trouver ta voie ?
Sur cet album, je n’ai pas raisonné ainsi… Le côté brut est surtout le côté sincère du cri spontané. Cet album a été fait de manière très instinctive. Les questions sont venues au fur et à mesure : j’avais envie d’un album sincère et j’ai posé ce que j’étais à ce moment-là. Je n’ai pas cherché à magnifier ni sublimer la réalité.
Justement cette voie, ce tâtonnement s’est également exprimé au travers de la forme de ton personnage Selim qui était un groupe et que tu as failli abandonner à un moment ?
Cette idée de tâtonnement est très intéressante parce qu’il représente la recherche des sons. J’ai crié, j’ai chanté dans les hauts, dans les bas… On ne sait pas trop où je me place. J’utilise ma voix d’une manière différente sur le disque comme si elle n’était pas définie. Et ça donne cet effet de surprise un peu permanent : je trouvais sincère de ne pas me figer à ce moment. J’avais également envie de personnaliser chaque chanson dans l’émotion qu’elle m’évoquait et le fait des les interpréter différemment avait ce sens-là.
Peut-on dire que "Maison Rock" est l’album du tâtonnement et que tu t’es trouvé depuis expliquant que tu parles déjà de son successeur ?
Si le terme de tâtonnement lui convient bien, je parlerais plus d’album de la recherche. J’ai essayé plein de choses qui m’aident aujourd’hui à me construire et savoir où j’ai envie d’aller. En revanche, si il peut y avoir du tâtonnement dans cet album, ce n’est pas pour autant qu’il n’exprime pas des choses : il y a un message à l’intérieur.
Si cet album est une ode à ton tiraillement musical majeur comme le nom de l’album l’indique à travers le jeu de mot "Maison" pour "House" pour son côté électro et "Rock" comme son nom l’indique…
… Exactement, une dualité !
… En revanche, le titre 'Le temps s’est levé' est clairement dans une veine rock traditionnelle avec son riff psychédélique entêtant et son chant alors que d’autres sont plus ancrés dans un univers électro pop. Ce mélange des genres est-il le fruit de la longue gestation de cet album ?
En fait, j’avais envie de ne rien me refuser. J’ai cette chance d’être libre et d’être dans un système indépendant même si ça a parfois ses inconvénients. En ce qui me concerne, c’est une force et un choix. Au regard de la sincérité qui planait au-dessus de cet album, j’ai eu envie d’essayer tout ce qui venait et me semblait coller aux chansons. Aujourd’hui que je l’ai fait, je suis heureux parce que j’ai fait un disque imparfait et en même temps, assez intéressant parce qu’il y a plein de choses.
Cet album sans restriction est le reflet d’un moment de recherche, depuis tu as trouvé ta voie, la suite des événements sera plus concentrée dans un style et moins riche ?
D’une certaine manière, il y a un peu de ça. Je suis allé chercher dans les extrêmes pour pouvoir comprendre les choses : plus le temps passe, plus je me rends compte que cet album est lié au passé, qu'il est une photographie d’une époque.
Il clôt un chapitre ?
Je pense que c’est vraiment ça !
Qu’est-ce qui t’a influencé sur ces parties orientales fortes qui évoqueraient pour nous un Orphaned Land?
Le côté oriental est lié à Selim qui est un nom oriental vennant de mes racines libano-égyptiennes.
Et on revient au passé que tu évoquais tout à l’heure à savoir que consciemment ou non, tu as intégré toute ton histoire dans cet album…
Exactement. C’est vraiment l’album de mes racines, une photographie du passé comme pour me mettre à niveau.
Tu as donc posé les fondations de cette maison dans cet album, tu peux dorénavant penser aux murs voire à la toiture…
Exactement !
Comme on l’a dit, l’influence orientale est forte notamment sur 'L’infini' ou 'Paranoïa' sorte de pendant oriental des africains 'Mama Sam' ou encore 'Amssétou' de M. Est-ce un clin d’œil ?
Pas forcément…
Mais ce genre de parallèle est appréciable ?
Ce n’est pas un clin d’œil dans le sens où je n’ai pas pensé à ça à ce moment-là. En revanche, ce côté oriental, mon père, mon frère, ma sœur… l’ont, et je me retrouve évidemment dans leur univers c'est une évidence !
Le solo de guitare de 'Soleil' évoque les Rita Mitsouko 'Y’a d’la haine' : est-ce une influence pour toi ?
J’ai été bercé par les Rita Mitsouko parce que mes parents les aimaient beaucoup et je pense qu’inconsciemment, ça a dû jouer.
Jusque là, on est plutôt bon, on ne s’est pas encore trompé…
Carrément (Rires) !
La phrase "Je griffe les murs pour me faire les ongles" extraite de 'Paranaioa' : est-ce le côté félin de ta compagne sorte de deuxième hommage à Chat (NDLR : petit nom qu'il donne à sa petite amie) après 'Comme des chats' ou un vrai besoin cathartique d’extérioriser ta tristesse ou les deux à la fois ?
Écoute, c’est une des questions les plus étonnantes que l'on m’ai posée et qui est d’une grande justesse. Je dirais que c’est un peu des deux mais effectivement, il y a un lien avec elle et jusqu’à présent, personne ne l'avait fait…
"Cet album est tellement intime qu’en faisant table rase du passé, il y a une sorte de déchirement"
Comme tout le monde va lire cette interview, tout le monde le saura… La mélancolie est omniprésente dans tous les titres même sur 'L’amour éternel'. Quand tu évoques l’amour éternel, tu le relativises en évoquant le manque, pourquoi ?
La mélancolie est présente parce que je parle de la mort dans cette chanson. Cet album est tellement intime qu’en faisant table rase du passé, il y a une sorte de déchirement. En revanche, un titre comme 'Soleil' explique cela : il y a de la mélancolie mais j’aperçois le soleil et c'est une projection positive sur l’avenir.
Fais-tu partie de ces artistes qui ne peuvent exprimer des sentiments profonds qu’à travers la tristesse ?
Non parce que je mets d’autres sentiments mais c’est vrai qu’à ce moment-là, c’était assez lourd dans ma tête ce qui explique que ça se ressente particulièrement sur cet album.
Tu as parlé d’album intime maintenant qu’il est sorti, comment vis-tu le fait de laisser à la libre interprétation de l’auditeur ces sentiments qui ne t’appartiennent plus vraiment finalement ?
Tout d’abord, je suis agréablement surpris parce que les gens qui ont pris le temps d’écouter cet album semblent le ressentir plutôt bien. Cela me rassure dans le sens où ce que j’ai voulu exprimer n’est pas reçu d’une manière totalement opposée. Cela me fait également plaisir parce que cela veut dire que quand je veux exprimer une émotion, le message passe. Cet album marque comme un petit deuil en acceptant d’évoluer et faire les choses différemment par la suite…
La sortie de cet album marque le passage à l’âge adulte ?
Je le deviens (Rires) !
Comme on a pu le constater en interviewant ton père, tout est histoire de famille et de partage chez les Chedid et tu le prouves en laissant la réalisation de 'Paranoïa' à ta sœur aînée Emilie : vu ton coté touche à tout, n’aurais-tu pas pu le faire seul ?
Non parce que l’image est quand même quelque chose de très important à notre époque. A ce moment-là, certaines choses m’échappaient totalement comme le fait de me représenter alors que je me cherchais encore… D’ailleurs ce clip est amusant parce qu’il parle de cela. J’avais donc besoin d'une personne d’image qui avait ce recul pour me donner des pistes et que je comprenne où je me situais.
Tu sembles parler au passé, tu l’as intégré depuis ?
Aujourd’hui, je serais plus apte à faire mon clip et d’ailleurs, c’est probablement ce qui va se passer.
Une des caractéristiques de cet album est d’avoir fait une version limitée de 500 exemplaires faite de ta main ? Pourquoi ?
Déjà parce que je vends mon album moi-même. Comme je ne suis pas dans une maison de disques, étant donné que je suis dans une démarche artisanale et plus humaine aussi, je trouvais que faire une édition limitée était l’occasion d’avoir un objet un peu plus personnalisé… Et dans le cadre d’une démarche artistique, je trouve cela plus créatif.
Cette pochette limitée évoque "Turn Back" de Toto : vois-tu le rapprochement ?
On m’avait parlé de Jean-Charles de Castelbajac qui aurait fait un dessin de ce type… Pour répondre à ta question, je vois Toto mais je ne vois pas la pochette dont tu parles. (Après consultation sur son Iphone) C’est drôle parce que je ne la connais pas mais je vois l’idée et c’est même amusant !
Et un groupe comme Toto fait-il partie de tes influences ?
Même si je pourrais connaître, ce groupe ne fait pas trop partie de ma génération…
Quels sont les premiers retours et qu’attends-tu de cet album ?
Les retour sont plutôt bons. Maintenant il faut continuer à travailler, jouer et faire exister cet album parce qu’au fil du temps, on évolue et on interprète différemment. J'espère qu'il rencontrera son public et qu'il lui fera du bien. Mais encore une fois il faut que cet album puisse toucher les gens comme une première rencontre sensuelle…
A commencer, le 27 Novembre pour la release party au Badaboum ?
Tout à fait, créer un contact avec le public sera déjà très beau !
On a évoqué la longue gestation de cet album et la pression liée à la filiation, un album réalisée dans des conditions artisanales. En revanche, n’as-tu pas peur pour la suite de ne pas pouvoir retrouver rapidement la richesse créative de cette "Maison Rock" ?
Il y aura des trucs en moins, des trucs en plus… il y a encore tellement de travail à faire… Ce n’est pas comme si je sortais mon énième disque, je sens que j'ai encore beaucoup de choses à dire.
On a évoqué les retours. Quels sont ceux de ton entourage ?
Honnêtement, je préférerais qu’ils répondent eux-même à cette question : je trouverais ça plus intéressant et amusant…
C’est le type de réponse pour ne pas dire qu’ils n’ont pas aimé…
(Rires) Pas du tout ! Je pense qu’ils l’ont tous ressenti à leur manière mais mon père a beaucoup aimé la réalisation, les arrangements… Je crois que mon frère a été touché d’une manière un peu plus globale ; il a été très réceptif et m’a dit que c’était un bon disque. Ça m’a fait super plaisir !
Question traditionnelle de Music Waves, quel est ton meilleur souvenir d’artiste ?
Je refais un blanc comme pour ta première question (Rires) !
… au contraire le pire ?
J’ai très envie de te répondre mais je ne raisonne pas trop de la sorte...
Alors plus que les meilleurs ou pires, les événements marquants de ta carrière ?
J’ai vécu une grande tournée avec mon grand frère. On est parti pendant deux ans sur la route et j’ai joué dans des salles, dans des Bercy et ça m’a fait de l’effet ! Ça a été une grosse expérience.
"Ma plus grande fierté a été d’avoir fait ce disque qui m’a permis d’assumer l’envie de faire de la musique"
Et j’imagine aussi la sortie de cet album ?
Cet album est un joli petit projet qui participe à ma constitution personnelle. Donc oui, peut-être que ma plus grande fierté a été d’avoir fait ce disque qui m’a permis d’assumer l’envie de faire de la musique.
Merci Selim pour le temps que tu nous a consacré
On a vécu un bon moment qui m’a fait plaisir, on a parlé, évoqué des choses de façon sincère : tu n’es pas là pour me caresser dans le sens du poil ni pour me détruire et ce genre de dialogue est très constructif. Alors merci à toi
Plus d'informations sur http://www.maisonrock.com/
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